Les yeux du monde étaient rivés sur la capitale britannique qui abritait jeudi dernier le Sommet du G20. Mesures de sécurité exceptionnelles, défilés de personnalités, manifestations altermondialistes… Les 2 500 journalistes accrédités pour l'événement n'ont pas chômé. Gros plan. Le rideau est tombé, la fièvre aussi. Satisfaits de leur travail comme de bons petits écoliers, les chefs d'Etat du G20 se sont dit au revoir et sont remontés dans leurs jets. Après avoir rangé leurs banderoles et ravalé leur colère, les manifestants se sont également dispersés. Reste les policiers, qui avec le sentiment du devoir accompli, finissent de déboulonner les grosses palissades métalliques, avec lesquelles ils ont encerclé le lieu du sommet, un palais d'expositions situé au sud de Londres, sur les rives de la Tamise. Il est 21h, ce jeudi, les derniers bus de journalistes quittent l'Excel Center. 2 500 ont été accrédités pour la couverture de la rencontre. Dans la salle de presse, aussi grande qu'un terrain de football, les langues s'entrechoquent. Envoyé spécial du quotidien suisse Le temps, Eric observe l'effervescence de ses confrères d'un œil très distrait. Il est davantage préoccupé par la concision de l'article qu'il doit écrire. Pas plus d'un quart de page, l'a instruit sa rédaction, très stricte en matière d'espace. Pour les médias anglo-saxons, l'événement en revanche, est exalté, au point d'avoir poussé certaines chaînes à déplacer les plateaux de JT sur le lieu du sommet. La plénière étant tenue à huis clos, les présentateurs meublent le temps creux en convoquant devant les caméras une foule d'experts. Leur rôle étant d'anticiper la nature des résolutions qui seront prises par le G20 et les commenter. Les écrans de télévision disséminés dans toute la salle diffusent aussi, en continu les évènements qui se déroulent à l'extérieur de l'Excel Center. D'actualité, il s'agit surtout des velléités de manifestations en direction du lieu du sommet, mué en véritable bunker. Plus de 3 000 éléments de différentes forces de sécurité, dont les unités antiterroristes y sont déployées. Un périmètre de sécurité de 800 mètres isole l'Excel Center du reste de Londres. Les stations de métro situées à proximité ont été fermées. Des hélicoptères survolent la région constamment, en quête d'une procession suspecte. Une semaine avant le sommet, des militants écologistes avaient annoncé l'acheminement d'un glaçon géant en forme d'iceberg à l'endroit de la rencontre, en vue de protester contre le réchauffement climatique. Or à la place de l'iceberg, ce sont leurs illusions qui ont fondu en chemin. Face au rideau de fer déployé par les policiers, les activistes ont dû tout bonnement renoncé à leur projet. Plus aventureux, des jeunes mobilisés contre le chômage, ont tenté de forcer le périmètre de sécurité. En vain. Rabroués avec fermeté, ils se sont retrouvés mêlés à quelques dizaines de sympathisants palestiniens et à une poignée de réfugiés éthiopiens, loin très loin de l'Excel Center, où les échos de leurs slogans, à peine audibles, ne reflétaient guère qu'un chahut. La veille, au centre de Londres, les manifestations avaient failli tourner au drame, quand des groupes de protestataires ont ciblé le siège de la Banque d'Angleterre et une succursale de Royal Bank Of Scotland (en grande difficulté financière). Un manifestant a trouvé la mort, terrassé par une crise cardiaque, une soixantaine de protestataires ont été interpellés par la police et des milliers d'autres dispersés à coups de matraque. Dans la soirée, la City — quartier d'affaires londonien et première place financière européenne — était sous un nuage de gaz lacrymogène. Au même moment, à Buckingham Palace, le parfum du luxe et de l'élégance, envahissait les salons où la reine Elizabeth II recevait les chefs d'Etat du G20 et leurs épouses. Les objectifs des caméras étaient surtout rivés sur la première dame des Etats-Unis, hissée au rang de star de cinéma. Pour beaucoup, Michelle Obama est une résurrection de Jackie Kennedy, en version plus moderne, moins photo glacée. À bien des égards, son mari est également confondu à JFK. Il a du charme, du charisme et des idées. À son contact, même les journalistes se transforment en groupies. Jeudi 18 heures, le président américain se présente pour une conférence de presse. Aussitôt, des dizaines de reporters brandissent leurs téléphones portables pour le prendre en photo. Beaucoup se disputent le privilège de lui poser une question. Obama provoque l'hilarité de l'assistance au cours d'un échange de propos avec une journaliste indienne. Suite à un “merci” très appuyé dont elle s'est illustrée en réponse aux compliments qu'il a adressés au président de l'inde, le locataire de la Maison-Blanche lui a demandé sur un air coquin si ses remerciements ne trahissaient pas une idylle secrète. Pendant un peu plus d'une heure, le président américain a surfé sur des sujets sérieux avec un humour et une simplicité inouïs. 400 journalistes ont assisté à sa prestation. Peu avant lui, d'autres membres du G20 se sont adressés à la presse pour mettre en valeur les résolutions du sommet. Le président français, Nicolas Sarkozy, qui avait menacé de le quitter, s'il n'aboutissait pas à des mesures sérieuses, est paru triomphant. Désormais dans la cour des grands, des chefs d'Etat comme l'Inde ou le Brésil, étaient aussi courtisés par les médias. Outre les performances de son pays, la présidente de l'Argentine, Cristina Kirchner, a ravi l'attention des médias pour son élégance. Sur la photo de famille, elle est une note de finesse au centre d'une bande de machos. De photo, il s'agit en fait d'une seconde version. Sur le premier tirage, les organisateurs se sont rendus compte que le Premier ministre canadien, Stephen Harper, ne paraît pas. Au moment où ses homologues posaient devant les photographes, il était… aux toilettes. Sa défection est à mettre sans doute, sur le compte de quelques légers impondérables qui ont émaillé le sommet. Pour tout le reste, Londres assure avoir rempli sa mission. S. L.-K.