L'idée, largement reprise par les médias, qui consiste à admettre que la déconnexion du système bancaire algérien des marchés financiers extérieurs nous protège des effets de la crise est fausse. Deux problèmes consécutifs au traitement actuel de la crise par les grands pays sont à prendre très au sérieux et à traiter par les décideurs en charge de la gouvernance économique et financière de l'Algérie (gouvernement, Banque d'Algérie). Il s'agit de la gestion de deux pressions asymétriques conjuguées : la pression à la baisse sur la valeur de nos réserves de changes et la pression à la hausse sur nos importations de marchandises. Ces deux pressions menacent à terme nos équilibres macro-économiques (réserves de changes, balance commerciale). S'agissant de la première, elle s'intensifie par la mise en œuvre du plan de relance américain avec la chute programmée du taux de change du dollar. Cela proviendra, comme nous le rappelle Le Monde du 14 avril, du fait que “que les Etats-Unis vont devoir placer sur les marchés financiers entre 1 700 et 1 900 milliards de bons du Trésor”. La capacité de rachat de ces bons par la FED étant limitée du fait d'un déficit budgétaire colossal, il ne restera plus qu'à les monétiser en les faisant racheter par la Chine, la Russie et les pays de l'Opep essentiellement. Si cela est encore possible, car la Chine, par exemple, a déjà observé que les Etats-Unis devaient avoir une politique budgétaire et financière beaucoup plus rigoureuse. Alors s'ouvre déjà une période de grande incertitude sur la parité du dollar. Le quotidien français cité soutient même “qu'à partir de cet été on va commencer à assister à une baisse régulière du dollar”. Ajoutée à cela, la rémunération de ces bons est structurellement négligeable du fait d'une inflation persistante basse, entraînant un faible taux directeur. Alors que faire pour sauvegarder la valeur de nos réserves de changes du moins la partie libellée en bons du Trésor américain ? Il s'agit du premier problème dont la prise en charge est urgente. Non moins urgente est la prise en charge du second problème. Il est maintenant clairement affiché que les économies de l'UE devront rechercher les points de croissance de leur PIB auprès d'économies solvables qui font encore de la croissance. Les résultats de la dernière enquête du Programme Invest in Med de l'agence Anima Investment Network confirment cette stratégie de recherche active de nouveaux débouchés. Les cibles commerciales sont vite trouvées : la Chine, l'Inde, les pays de l'Opep, mais aussi les pays de la région Mena, singulièrement l'Algérie. Cela explique les vives réactions des espaces intermédiaires et des milieux d'affaires de ces pays à l'encontre des circulaires Ouyahia qui visaient à sauvegarder les équilibres commerciaux du pays. Mais à bien voir, les pressions commerciales viendront aussi de là où l'on s'attend le moins : de nos voisins et frères. L'explication est simple. La Tunisie est complètement entrée dans la zone de libre-échange et le Maroc le deviendra dans deux ans. Moyennant quoi, les produits semi-finis et aussi les produits de consommation en provenance de l'UE entrent chez eux sans taxes. Il suffira alors d'un conditionnement élémentaire ou d'un simple packaging pour revendre ces mêmes produits sans taxes en Algérie en vertu des dispositions de l'accord sur la Zale. Cela est une concurrence déloyale vis-à-vis des producteurs algériens qui eux sont encore soumis à des barrières tarifaires vis-à-vis de l'UE s'agissant de ces mêmes produits. C'est le retard de phase pris par l'Algérie dans son processus d'adhésion au marché de libre-échange avec l'UE qui offre ce créneau pour quelques années. D'où l'importance pour les autorités algériennes de la notion de certificat d'origine justifiant une intégration significative. Cela explique la montée au créneau de la Direction générale des changes de la Banque d'Algérie qui rappelle dans sa note n° 16/DGC/2999 l'obligation de produire pour toute importation réglée par crédit documentaire ou remise documentaire trois documents : le certificat phytosanitaire pour tout produit agroalimentaire, le certificat de conformité aux standards et normes nationaux délivré par une institution indépendante et le certificat d'origine. En quoi ces dispositions posent-elles problème ? Mais pour équilibrer la balance commerciale, il faudra en plus développer forcément nos exportations hors hydrocarbures. Assurément, on est encore loin du compte.