Ils étaient des milliers, plus de 5 000 en tout cas, à répondre par leur présence à l'appel à la marche lancé déjà il y a quelques jours par les étudiants et par le militant de la cause berbère Ferhat M'henni. C'était la surprise ! Personne à Tizi Ouzou n'osait imaginer qu'une marche organisée dans le cadre de la célébration du 29e anniversaire du Printemps berbère d'Avril 80 pouvait encore, en 2009, drainer une foule aussi nombreuse, surtout lorsque l'on sait que l'initiateur n'est autre que le Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie (MAK) qui n'a pas pu, pour rappel, rassembler plus de 300 personnes lors des marches organisées ces trois dernières années dans le même cadre. Pourtant, l'inattendu s'est produit. Ils étaient des milliers plus de 5 000 personnes en tout cas, à répondre par leur présence à l'appel à la marche lancé déjà il y a quelques jours par les étudiants et le mouvement MAK dirigé par le militant de la cause berbère Ferhat M'henni qui était, est-il besoin de le signaler, le plus grand absent de la “fête” en raison, disent les militants de sa cause, d'un mandat d'arrêt lancé à son encontre dans la wilaya de Bouira par la justice qui l'a poursuivi pour plusieurs chefs d'accusation. Prévue à 10h, la marche s'est finalement ébranlée de l'université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou vers 10h30 pour s'achever devant le siège de l'ex-mairie de Tizi ouzou dans le centre après avoir traversé les artères principales de la ville. La marée humaine, qui s'est regroupée déjà depuis 9h devant le portail de l'université portant le nom de l'écrivain Mouloud Mammeri, a emprunté la rue des Frères-Ouamrane, puis la rue Lamali-Ahmed longeant le CHU Nédir-Mohamed de Tizi Ouzou, arborant des centaines de drapeaux jaune et bleu du MAK et scandant les slogans habituels hostiles au pouvoir, particulièrement à Bouteflika et son premier relais local Ould Ali El-Hadi, et favorables à l'autonomie de la Kabylie. “Ulac smah ulac”, “Corriger l'histoire, l'Algérie n'est pas arabe”, “L'autonomie thela thela”, “Kabylie chouhada” sont entre autres slogans scandés à tue-tête par la foule au-dessus de laquelle on pouvait également apercevoir des banderoles sur lesquelles étaient inscrits : “Votre répression renforce notre détermination” ; “Halte au harcèlement judiciaire contre Ferhat M'henni”. Parmi la foule, composée majoritairement d'étudiants et d'étudiantes, on pouvait reconnaître des sympathisants de l'ex-mouvement citoyen, des militants du FFS et du RCD et de nombreux anonymes dont certains disent avoir répondu non pas à l'appel du MAK, mais tout simplement à l'appel du 20 Avril “par devoir de mémoire”, précisent-ils. D'autres encore disent que s'ils sont venus participer à cette marche, “c'est uniquement pour signifier que la Kabylie n'est pas totalement acquise à Bouteflika comme le prétendent ses relais locaux lors de l'élection présidentielle passée”. Arrivé au premier rond-point, baptisé place des Martyrs en 2006, c'était le suspense. Dans son appel à la marche, le MAK avait fixé l'avenue Abane-Ramdane, communément appelée la Grand-Rue, comme itinéraire alors que les étudiants, dans leur appel, ont fixé un autre itinéraire à leur marche, à savoir vers le siège de la wilaya. Jusque-là unis, mais se sépareront-ils au rond-point pour suivre chacun son itinéraire ou bien poursuivront-ils la marche dans l'union ? ne cessait-on de s'interroger. Finalement, est l'itinéraire choisi par le MAK pour lequel tout le monde a opté. Dans une déclaration distribuée à la fin de la marche, le MAK a expliqué que “la marche que nous venons de faire est l'expression de notre reconnaissance pour toutes les générations de Kabyles qui avaient consenti de lourds sacrifices pour que nous arrivions aujourd'hui au combat pour l'autonomie de la Kabylie. Elle est mémoire et avenir”. Dans la même déclaration, on peut également lire que “les intimidations et la répression qui n'ont pu venir à bout du combat identitaire et linguistique des acteurs des années du parti unique ne peuvent, comme toujours, que renforcer notre détermination à aller de l'avant”. À 12h, les manifestants se sont dispersés dans le calme et sont repartis, sans doute, avec le sentiment que le Printemps berbère a été célébré comme il se doit. Samir Leslous