Force est de constater que les journalistes dans leur majorité sont livrés à eux-mêmes, déchirés par les clivages et souvent affaiblis par l'absence d'une représentation digne de porter leurs revendications. Comme chaque année, la Journée mondiale de la liberté de la presse constitue une occasion pour faire le point sur la situation de la presse algérienne. Aujourd'hui, le constat est sans appel concernant la situation matérielle et socioprofessionnelle : à l'instar des salariés des autres secteurs, les journalistes algériens sont confrontés à une série de problèmes, essentiellement celui des salaires et du logement. Depuis au moins deux décennies, on a beaucoup parlé des obligations du journaliste, de ses responsabilités vis-à-vis de la société, des épreuves qu'il a endurées, voire même des menaces qui pèsent sur lui. Durant cette période, beaucoup de promesses ont également été faites, à différents niveaux, notamment sur son droit d'avoir un statut professionnel, d'accéder à une formation continue et à un perfectionnement, de bénéficier de conditions de vie et de travail respectables qui favoriseraient l'exercice de son métier et préserveraient, dans le même temps, son indépendance vis-à-vis des sphères politiques, du patronat, tant public que privé, et de certains groupes de pression. Dans la réalité, force est de constater que les journalistes, dans leur majorité, sont livrés à eux-mêmes, déchirés par des clivages et souvent affaiblis par l'absence de couverture syndicale. Pourtant, pour ceux et celles qui ont adhéré au Syndicat national des journalistes (SNJ), se pose la lancinante question de la représentation syndicale. D'aucuns parlent d'un SNJ qui a “un fil à la patte”, d'autres critiquent le non-renouvellement de ses structures dirigeantes. Même les journalistes qui, auparavant, avaient tablé sur la renaissance de l'UGTA, à travers la création d'une fédération chargée des médias, ont fini par ne plus y croire à cause de la politique imposée par la direction, plus prompte à manifester son alignement au système politique que d'investir le terrain des luttes syndicales et celui de la mobilisation du monde du travail. Depuis le début des années 90, qui ont vu la création de l'éphémère Syndicat national des journalistes algériens (SNJA), à ce jour, on remarque que la construction d'une organisation syndicale des professionnels de l'information s'est faite par le haut, au détriment du travail dans chaque rédaction. Ce type de structuration n'a rien donné, dès lors que des amalgames ont été entretenus, entre autres, entre les intérêts des journalistes et ceux de leur organe d'information. Par ailleurs, le problème de la représentation syndicale a découragé plus d'un. Seulement, les professionnels de l'information, qu'ils soient syndiqués ou non, ont une part de responsabilité : bon nombre d'entre eux ont démissionné ou pris cette fâcheuse tendance à la procuration, préférant s'adosser entièrement sur les syndicalistes mandatés, sans exiger de ces derniers des comptes ou leur renouvellement. De l'avis des confrères, les journalistes ont du mal à s'organiser, car ils ne sont pas conscients de leurs propres intérêts ou sont encore méfiants par rapport au fonctionnement actuel du cadre syndical. En cette journée du 3 mai, rappelons que le droit à l'information, à la libre expression et à la critique représente une des libertés fondamentales qu'il faut protéger à tout prix. Mais, aujourd'hui plus que jamais, il est légitime de se demander quel avenir réserve-t-on à l'indépendance de la presse nationale, quand les journalistes se trouvent, pour la plupart, sous le coup de massue de la précarité matérielle et syndicale. H. Ameyar