Le célébrissime Martin Scorsese, président de la World Cinema Foundation, a été très visible cette année à Cannes. De la conférence de presse, durant laquelle il a fait un bilan du travail accompli et évoqué les perspectives d'avenir de son organisation qui a pour but de restaurer des films anciens, à ses apparitions nocturnes où il a donné libre cours à ses émotions devant un parterre de cinéphiles, en passant par la montée des marches, le réalisateur de la Dernière Tentation du Christ et des Affranchis a satisfait beaucoup d'envies des festivaliers en semant le bonheur à tout vent sur la Croisette. Le 16 mai, beaucoup de cinéphiles affranchis de leurs tâches quotidiennes sont venus rejoindre le réalisateur de Taxi Driver (Palme d'or en 1976) pour une soirée spéciale de la 62e édition du Festival de Cannes, durant laquelle il a présenté le mythique les Chaussons rouges, tourné en 1948 par Michael Powell et Emeric Pressburger, dans une copie récemment restaurée. La projection conjuguée avec la présence de Martin Scorsese a ému le public. Le 15 mai, c'étaient les journalistes qui ont eu l'occasion d'écouter le cinéaste le plus engagé dans la restauration et la préservation des films. Ce travail se fait par le bais de sa World Cinema Foundation qui a été inaugurée à Cannes en 2007. Cette année, il présente quatre films : A Brighter Summer Day (1991) d'Edward Yang, Jeux de tournage de Stig Björkman, Redes de Emilio Gomez Muriel et Al-Momia de Shadi Abdel Salam. Lors de cette conférence de presse fréquentée par de nombreux journalistes, le restaurateur de films a rappelé les objectifs de son association à but non lucratif, qui “a été créée pour permettre la restauration et la conservation des films. C'est une bataille extrêmement ardue car le temps est un cruel ennemi. Cette association a été mise en place car nous sommes passionnés et concernés. Dix-sept réalisateurs sont membres de notre conseil consultatif ; ils viennent des quatre coins du monde et font de précieuses suggestions”. Il a également remercié ses partenaires arabes pour leur engagement dans la sauvegarde du cinéma arabe tout en soulignant qu'il est importants que ces films restaurés soient vus. “Or, les modes de distribution changent actuellement. Les spectateurs cherchent maintenant d'autres plateformes : en salle, en vidéo, sur Internet. C'est pour offrir de nombreuses possibilités de visionnage au public que nous avons développés des partenariats avec The Autheurs, une cinémathèque virtuelle, B-Side qui gère notre site Web, et Criterion chargé de la distribution en DVD de ces films.” Mais ce travail gigantesque ne se fait pas facilement, notamment en ces temps de crise. À ce sujet Martin Scorsese dira, tout pessimisme mis à part, avec toutes les aides de bonnes volontés, il est impossible de sauver tous les films : “Nous allons perdre irrémédiablement de nombreux films. Ceux que l'on pourra sauver, ce sera toujours ça.” Le réalisateur de la Dernière Valse (1978), a annoncé que le site The Autheurs offre aux internautes la possibilité de visionner gratuitement quatre films très rares restaurés par sa Foundation. Il s'agit de Dry Summer de Metin Erksan (1964), Touki Bouki de Djibril Diop Mambéty (1973), Transes de Ahmed El Maânouni (1981) et The Housemaid de Ki-young Kim (1960). Enfin, ceux qui n'ont pas eu la chance de voir de près ce dieu mythologique du cinéma se mélanger aux humains le temps du festival de Cannes lors de ses événements largement médiatisés, ont dû certainement l'apercevoir monter les marches vers l'Olympe. À moins qu'ils aient entrevu le réalisateur de les Infiltrés s'infiltrer discrètement dans une des salles cannoises toujours bondées.