Il fallait y penser. Un monde sans publicité, c'est toute l'économie d'un pays qui se trouve paralysée. Luc Laurentin, spécialiste de la communication, construit une fiction qui frôle l'apocalypse dans une France devenue otage de la pub, surtout depuis que Sarkozy à l'Elysée en est accro. Un jour, alors que personne ne s'y attendait, les publicitaires, les marketers, les concepteurs, en un mot tous les créateurs, ont décidé de se mettre en grève. Immédiatement, c'est l'Hexagone qui devient subitement morose et atone, à commencer par le président de la République. Ce dernier met en place une cellule de crise plus sensible que celle d'un danger nucléaire. C'est la chaÎne des différentes parties qui se met en branle : les grands supports (Decaux, Bolloré, Lagardère, Publicis), amis non cachés de Sarkozy, les grands annonceurs comme la SNCF, Renault ou France Télécom. Les écrans de télévision se contentent de rediffusions, les radios sont devenues monotones sans les pubs qui cassaient le train des mots qui se suivent et la plupart des journaux mettent un à un la clé sous le paillasson. “Deux semaines plus tard, la France était K.O. La vie quotidienne avait basculé dans une grisaille inattendue… C'était le pays tout entier qui prenait conscience de la place que celle-ci (la publicité) avait prise dans sa vie de tous les jours comme dans son économie. Et le traumatisme était profond. Aucun secteur n'était épargné.” (p 137). Succinctement résumé, ce roman fiction donne des frissons et démontre à quel point la publicité est ancrée dans le quotidien des citoyens qui arrivent à perdre leurs repères et leur ancrage dans la société de consommation. Moralité, il ne faut jamais dresser un carton rouge pour la pub. Car c'est l'arbitre qui se retrouve sur le banc de touche. NO PUB, de Luc Laurentin et Thierry Piétard, 190 pages, Editions Eyrolles, France. - Luc Laurentin sera à Alger le 6 juin prochain pour participer aux 3es Journées euromaghrébines sur la publicité.