La médiation “n'est pas incompatible” avec la profession d'avocat, et ce dernier peut jouer aussi bien le rôle de médiateur que de conseil, a indiqué hier à Alger Me Farid Ben Belkacem, avocat agréé près la Cour suprême et le Conseil d'Etat. “L'avocat peut jouer un double rôle, il peut être médiateur et, à ce moment-là, il faut qu'il soit totalement indépendant tant par rapport à la cause qu'aux parties et qu'il n'ait aucune relation directe ou indirecte avec l'affaire”, a expliqué à l'APS l'expert qui participe au 2e jour du séminaire sur les pratiques de la médiation. L'avocat peut rédiger, en second rôle, le rapport de médiation ou l'accord transactionnel et il n'y a pas mieux que ce dernier ou un juriste pour le faire, a-t-il ajouté. Sur ce point, il a indiqué avoir constaté que “plusieurs” de ses confrères “sont contre le fait que des avocats deviennent des médiateurs”, relevant que cette pratique est courante au niveau international. “Les avocats pensent que la médiation leur enlève une partie de leurs prérogatives, sinon leur gagne-pain”, a-t-il estimé, expliquant qu'au contraire “dans la médiation, les parties peuvent se faire assister de leurs conseils (avocats)”. Par ailleurs, Me Ben Belkacem a indiqué que la médiation judiciaire, telle instituée par le nouveau code de procédure civile et administrative, “n'a pas rencontré un très grand enthousiasme auprès des avocats algériens”. Il a expliqué que cette notion a été absente dans les procédures de prévention et de règlements des litiges depuis l'Indépendance, sauf quelques exceptions en matière sociale. Il a également relevé le rejet de la médiation par les avocats en raison de “l'inexistence”, dans le cursus des étudiants, de module spécifique sur cette pratique à l'instar de l'arbitrage, qui n'est enseigné qu'en postgraduation (magistère). Pour Me Ben Belkacem, les avocats “n'ont pas su” utiliser le délai d'une année pour la mise en application du nouveau code pour initier des formations et surtout communiquer, avec les confrères, pour les préparer à ces nouvelles dispositions. “Les deux séminaires, organisés à Alger, étaient insuffisants et n'ont touché que peu d'avocats”, a-t-il encore estimé, ajoutant que “certains avocats découvrent à peine ce qu'est la médiation”. Me Ben Belkacem a appelé à une campagne de sensibilisation auprès des avocats pour “booster cette procédure qui peut connaître un succès certain et ce dans l'intérêt de tous”. Initiée par le Centre de recherche juridique et judiciaire, la rencontre a vu la participation du premier président de la Cour suprême, M. Kaddour Berradja, de la présidente du Conseil d'Etat, Mme Fella Henni, de procureurs généraux, des ambassadeurs de Grande-Bretagne et d'Espagne et du chargé d'affaires libanais. La rencontre se déroule également en présence de 400 médiateurs et juges algériens et étrangers de plusieurs pays dont la Jordanie, le Liban, la Tunisie, le Maroc, l'Espagne, la France, la Suisse, la Belgique et l'Allemagne.