Photo : S. Zoheir Synthèse de Rabah Iguer Les avocats apportent un concours «de plus en plus utile», en termes de sécurisation juridique, à la vie et aux activités des entreprises et autres agents économiques, ont estimé hier à Alger des experts nationaux et internationaux. De «grandes perspectives» se sont ouvertes à la profession d'avocat qui a connu de «profondes mutations» tant dans ses missions que dans la façon de les assumer, selon les experts qui prennent part à un séminaire sur «la sécurisation juridique et financière apportée par l'avocat à la création et à l'activité des entreprises», organisé à la Résidence des magistrats. La profession d'avocat «évolue et tend à s'adapter aux changements culturels et socioéconomiques que chaque société subit», selon les intervenants, qui ont expliqué que l'avocat s'insère et s'intègre dans la vie économique, notamment par ses prestations et ses conseils aux entreprises. L'avocat espagnol Ramon Mullerat a relevé, dans ce contexte, que le passage d'une ère économique à une autre «a ébranlé la sécurité juridique», qui constitue «un des principes fondamentaux de l'Etat de droit». «La sécurité juridique doit être prévisible et fondée sur le droit à un procès équitable et garantie par la qualité de la loi qui doit être normative, c'est-à-dire prescrit, interdit et sanctionne», a-t-il précisé. Il a ajouté que l'insécurité juridique «inquiète les citoyens et décourage les opérateurs économiques», alors que la sécurité juridique «est une condition essentielle du bon fonctionnement des entreprises et du développement économique d'un pays». Elle implique que les opérateurs économiques puissent à l'avance connaître les avantages et les inconvénients de leurs actes ainsi que leurs droits et obligations. «L'avocat est un élément essentiel pour l'existence et la préservation de la sécurité juridique et, par conséquent, de la protection de la société», a-t-il insisté. Me Roman Oria Fernandez de Muniain, également avocat espagnol, a relevé de son côté que l'internationalisation des moyens de production et le flux transnational des capitaux a fait que les législations nationales «ne peuvent perdre de vue» les traités internationaux et les règles commerciales, fiscales et administratives des différents pays. Il a estimé à cet égard que la crise financière internationale qui a engendré une crise de productivité «n'est rien d'autre qu'une faillite de la sécurité juridique globale», qu'il a résumée par «l'absence de régulation et de supervision dans les marchés financiers transnationalisés». Me Fernandez de Muniain a considéré aussi que la situation économique mondiale confirme que «le contrôle unilatéral des institutions financières, comme la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international, ou encore l'Organisation mondiale du commerce, n'offre pas une sécurité juridique réelle». «La sécurité juridique est une pièce maîtresse dans le monde économique», a-t-il conclu. Me Taib Belloula a, quant à lui, fait un exposé sur la législation du travail et les «difficultés» rencontrées par les avocats dans son application. Il a estimé ainsi que «la flexibilité de certains textes et la possibilité de jurisprudence laissées au juge font qu'il existe un cafouillage dans l'application des lois». Auparavant, un représentant du directeur du projet Meda II est intervenu pour expliquer que même si la profession d'avocat est une profession libérale, «elle demeure partie prenante de la justice et mérite toute l'attention pour être développée et modernisée». Il a indiqué que le choix d'avocats et d'experts espagnols pour prendre part à cette rencontre a été motivé par «l'expérience acquise par ces derniers dans le domaine de la sécurité juridique et financière». Quant à l'objectif du séminaire, il consiste, selon l'intervenant, à informer les avocats algériens des «nouvelles perspectives et les profondes mutations» que connaît leur profession, particulièrement celles relatives aux activités des entreprises et, plus généralement, de tous les acteurs économiques. «En Algérie la profession d'avocat semble, depuis quelques années, s'engager dans ce vaste mouvement de mutation, avec l'apparition de cabinets d'avocats spécialisés et d'associations d'avocats où le justiciable commun peut trouver le pénaliste, le civiliste, le spécialiste du droit de la famille», a expliqué le représentant de la direction du projet Meda II. Il a ajouté qu'un autre domaine d'intervention s'ouvre aux avocats, celui du règlement à l'amiable des conflits, appelé «modes alternatifs de règlement des litiges», tels que la conciliation, la médiation et l'arbitrage, prévus par le nouveau Code de procédure civile et administrative, qui entrera en vigueur en avril 2009. L'avocat, qui doit pouvoir intervenir et agir par ses conseils comme un véritable manager, est mis devant la nécessité de se préparer et se former pour faire face à ses nouvelles missions et sécuriser davantage les entreprises et les opérateurs économiques, a-t-il souligné. Cinq thèmes fondamentaux sont au programme de la rencontre, à savoir législation du travail en Algérie, sécurité juridique et développement des entreprises, sécurité juridique et financière apportée par l'avocat à la création et aux activités des entreprises, contrats commerciaux et arbitrage international. Organisé par la direction du projet d'appui à la réforme de la justice dans le cadre du programme de coopération Meda II, ce séminaire, auquel participent 40 avocats, s'étale sur deux jours.