Les échecs patents de la globalisation et les instabilités dans le monde sont aujourd'hui favorables à la résurgence des Non-Alignés. Faire renaître les non-alignés ! Tel a été le message du président Bouteflika devant plus de 50 chefs d'Etat du mouvement réunis en Egypte pour discuter des conséquences de la crise financière mondiale. Question : est-il possible de voir se concrétiser cet appel partagé par ailleurs par plusieurs chefs d'Etat ? Si l'on regarde le monde sous le prisme de l'OMC, il n'y a aucune chance. La globalisation a été ficelée par les grands de ce monde et même les nouveaux et potentiels candidats au club des décideurs de la planète ne pourront pas faire grand-chose. Mais la crise financière mondiale qui s'est prolongée dans les sphères économico-sociales avec les dégâts que l'on sait est tout de même propice pour des arrangements, des accommodements. Les pays du Sud pourraient, à tout le moins, développer leur éternel vœu d'une coopération multilatérale et faire bloc pour la défense de leurs intérêts vitaux. Bouteflika a montré la piste en plaidant pour que les non-alignés soient “une avant-garde de la promotion d'un nouvel ordre international porteur d'un multilatéralisme novateur, fait d'ouverture réciproque, de compréhension mutuelle et de solidarité active. Le président de la République, qui a rappelé que le non-alignement constitue un élément fondateur de la politique étrangère de l'Algérie, a assuré ses pairs que son pays assumera pleinement le rôle qui lui revient et la part de responsabilité qui lui incombe pour redonner son lustre au mouvement par la concertation et la solidarité”. En gros, l'Algérie plaide pour un nouvel ordre monétaire et économique international fondé sur un système financier international qui prenne en compte les besoins des pays en développement. A priori, ce n'est qu'une question de volonté politique si l'on considère que les Non-Alignés sont majoritaires aux Nations unies. Et au président Bouteflika de relever avec pertinence que les pays e0n développement doivent être pleinement représentés aux échelons de prise de décision des institutions internationales. Mais la réunion du Caire aura été plutôt dominée par les retrouvailles Inde-Pakistan, deux puissances nucléaires qui se sont déjà livrées trois guerres depuis leur indépendance en août 1947. La normalisation entre ces deux pays clefs du mouvement est en soi une victoire du mouvement et laisse à penser que les non-alignés sont décidés à crédibiliser leurs actions. Les Premiers ministres pakistanais et Indien ont affirmé que les relations entre leur pays étaient sur la bonne voie. “Nous croyons qu'une paix durable en Asie du Sud est réalisable”, a assuré pour sa part le Premier ministre pakistanais. Le sommet des non-alignés aura au moins relancé le processus de paix amorcé en janvier 2004 entre les deux voisins, dont les relations se sont nettement dégradées depuis les attentats de Bombay, qui ont fait 174 morts, dont 9 des dix assaillants, en novembre 2008, et ont été imputés par New Delhi à un groupe armé pakistanais avec la complicité des services de renseignement militaires d'Islamabad. La paix n'est-ce pas l'élément fondateur des Non-Alignés, un mouvement créé en 1955, en pleine guerre froide, par des Etats qui entendaient se distancier des blocs de l'Est et de l'Ouest ? Après l'effondrement de l'URSS et le bouleversement de l'équilibre mondial, sa raison d'être a été mise en question. Mais les crises économiques et les instabilités dans le monde sont aujourd'hui favorables à sa résurgence. D. B.