Cet énième incident entre les frères ennemis palestiniens vient rappeler que malgré un semblant d'accalmie, les relations entre les deux parties sont loin d'être normalisées. Dix cadres du Fatah, dont trois députés, quatre hommes et trois femmes ont été empêches par les forces de sécurité du Hamas de quitter Gaza pour se rendre au congrès de leur parti, qui ne s'est pas tenu depuis vingt ans, les dernières assises ayant eu lieu en 1989 à Tunis. Considérant cet acte comme une insupportable provocation du Hamas, qui exige la libération de nombreux activistes emprisonnés en Cisjordanie, le président de l'Autorité palestinienne, numéro un du Fatah, envisage le report du congrès si des délégués sont empêchés de participer. Depuis le coup de force du parti islamiste qui a pris le contrôle de Gaza en 2007, les membres du Hamas devaient obtenir un laissez-passer des services de sécurité pour quitter Gaza et se rendre en Cisjordanie. Les députés, par contre, ont toujours circulé librement. C'est donc la première fois que des parlementaires du Fatah se trouvent confrontés à cette restriction imposée par le Hamas sur le territoire qu'il contrôle. Cet énième incident entre les frères ennemis palestiniens vient rappeler que malgré un semblant d'accalmie, les relations entre les deux parties sont loin d'être normalisées. Au cours et immédiatement après l'offensive meurtrière de l'armée israélienne sur la bande de Gaza, des organisations humanitaires ont fait état d'une chasse aux militants de Fatah par les activistes du Hamas et de règlements de comptes expéditifs en plein jour et devant témoins. Des pourparlers entre les deux parties rivales sont engagés depuis plusieurs mois, sous les auspices du Caire, pour une réconciliation nationale, en vue de former un gouvernement d'union qui puisse à la fois entamer la reconstruction de Gaza et organiser des élections générales. Jusqu'à présent les efforts égyptiens pour trouver un compromis acceptable par les deux parties sont restés vains, et la Palestine se trouve en situation d'impasse politique. Le mandat du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, est arrivé à son terme, le Parlement doit être renouvelé, mais aucune élection n'est envisageable sans la mise en place d'un gouvernement d'union nationale, les territoires palestiniens étant sous la double autorité d'un gouvernement en Cisjordanie, reconnu à l'étranger, et d'un autre à Gaza, qui s'est imposé par la force et qui est dénoncé par les puissances et les institutions internationales. Cette situation inextricable a au moins un double effet négatif sur les efforts de relance du processus de paix et de l'édification d'un Etat palestinien viable. D'une part, l'Autorité palestinienne est affaiblie et souffre d'un déficit de légitimité en absence d'élection. D'autre part, le Hamas et ses activistes armés servent de prétexte idéal au gouvernement de Netanyahu qui n'entrevoit une possibilité de paix qu'à ses conditions et au détriment du peuple palestinien. Les pays arabes auraient pu jouer un rôle décisif dans la recherche d'une solution au conflit inter-palestinien s'ils n'étaient, pour la plupart d'entre eux, gênés aux entournures par leurs propres situations internes. Confrontés à une montée en puissance de l'islamisme politique chez eux, les régimes arabes sont réduits à ménager le choux et la chèvre dès qu'il s'agit du problème que pose le Hamas en Palestine. Or, chacun sait que tant que durera cette situation caractérisée par une autorité bicéphale et antinomique sur les territoires palestiniens, les forces expansionnistes et colonialistes d'Israël jouent sur du velours et les efforts de la communauté internationale perdent immanquablement de leur effet. M. A. Boumendil