Comme prévu, la réaction dans le camp du mouvement Hamas à la convocation par le président palestinien Mahmoud Abbas, d'élections présidentielle et législatives anticipées dans les territoires a pris une ampleur inquiétante. Dans un discours prononcé samedi dans son quartier général à Ramallah, en Cisjordanie occupée, le président Abbas avait décidé , rappelle-t-on, la tenue prochaine d'élections législatives et présidentielle comme seul remède à la crise politique, économique et sécuritaire que vivent les territoires, depuis la formation du gouvernement par le Hamas, en mars dernier, surtout après l'échec des négociations pour la formation d'un gouvernement d'union nationale. Des milliers de partisans du mouvement islamiste, parmi lesquels un grand nombre d'hommes armés et cagoulés, affichant clairement leur appartenance aux brigades Ezzeddine Al Qassam, la branche armée du mouvement, ont investi le centre de la ville de Ghaza, samedi, quelques heures après la fin du discours. Le discours était attendu, seule la date était inconnue. Ce n'était plus en tout cas qu'une question de jours. Retour sur une crise annoncée. La décision était prête, il ne restait plus qu'à en faire état. Tout comme la réaction. Furieux de la décision du président Abbas, les manifestants ont scandé des slogans très virulents à son égard. Mhamad Dahalane député, membre du conseil révolutionnaire du Fatah que le Hamas accuse d'être l'instigateur et le commanditaire de l'attentat manqué contre le premier ministre Ismaïl Haniyeh près du terminal de Rafah, au sud de la bande de Ghaza, à son retour, dans la nuit de jeudi à vendredi, d'une visite officielle dans plusieurs pays arabes en plus de l'Iran, n'a pas échappé aux insultes des manifestants. « Abou Mazen (Mahmoud Abbas), espion », « de (Mhamad) Dahalane au président, notre Autorité palestinienne est une Autorité de collaborateurs », « Non et cent fois non aux élections anticipées », ont lancé les manifestants. Dans cet attentat manqué, dénoncé par le président Abbas et toutes les forces politiques palestiniennes dont le Fatah, un des gardes du corps de Haniyeh a été tué alors que son chauffeur, son fils Abdel Salam et son conseiller politique Ahmad Youssef ont été blessés. l'accusation de Dahalane a provoqué une grande colère et une forte indignation parmi les partisans du Fatah, la principale force rivale du Hamas sur la scène palestinienne. l'un des dirigeants des brigades des martyrs d'Al Aqsa, la branche armée du Fatah, a promis de venger toute atteinte aux dirigeants du Fatah par l'assassinat de dirigeants du Hamas, à leur tête Haniyeh, Zahar et Siam. Dans la même soirée de samedi, des heurts ont opposé des manifestants appartenant aux Fatah et Hamas dans les villes de Khan Younès et de Rafah au sud de la bande de Ghaza faisant un mort et des dizaines de blessés dans les deux camps. les incidents les plus graves ont été enregistrés dimanche à Ghaza. Juste avant l'aube, lorsque des hommes armés de fusils mitrailleurs et de roquettes anti-chars ont attaqué un poste militaire de la Garde présidentielle, tuant un des éléments de ce service sécuritaire et blessant quatre autres. Des éléments de la Garde présidentielle ont alors bloqué toutes les rues menant vers Al Mountada, le quartier général du président Abbas à Ghaza, ainsi qu'à son domicile tout proche. De violents affrontements armés entre des éléments de la Garde présidentielle et des hommes armés ont eu lieu des heures durant dans le secteur. La Garde présidentielle a occupé les toits de certains immeubles, dont celui du ministère de l'agriculture. C'est donc le début d'un incroyable engrenage qui ira s'amplifiant par l'échange d'accusations et de coups. Dans un communiqué, le porte-parole des forces de la sécurité nationale, Taoufik Abou Khoussa, a accusé des éléments appartenant à la force exécutive relevant du ministre Saïd Siam, du Hamas, de l'agression contre les éléments de la Garde présidentielle. ces accusations ont été niées par le Hamas. Des témoins nous ont assuré que les tirs contre le secteur contrôlé par la Garde présidentielle partaient du ministère des affaires étrangères, de l'habitat contrôlés par le Hamas ainsi que d'autres immeubles du quartier Tel Al Haoua à l'est du secteur contrôlé par la garde présidentielle. Dans un autre communiqué, le Fatah a accusé les brigades Ezzeddine Al Qassam d'utiliser les toits des mosquées de Ghaza comme points militaires desquels ils tirent sur les citoyens dans les rues. Tout au long de la journée de dimanche, et avant que ne soit proclamé un cessez-le- feu, ces affrontements fratricides ont été signalés en plusieurs endroits de la bande de Ghaza, mais de moindre importance. C'est, toutefois, un calme tendu qui régnait hier matin à Ghaza. Les hommes armés des deux camps ont sensiblement réduit leur présence dans les rues de Ghaza, le Garde présidentielle du président Mahmoud Abbas maintenant toutefois des barrages sur les axes menant aux bureaux de la présidence. Des échanges de tirs, qui n'ont pas fait de victimes, ont opposé dans la matinée les activistes du Fatah et du Hamas dans le quartier Al Rimal mais en dépit de quelques escarmouches, l'accord de cessez-le-feu conclu la veille semble tenir globalement. Les affrontements ont fait trois morts et une trentaine de blessés dans la journée de dimanche et un quatrième mort samedi soir. Trêve ou pas, Ghaza semble avoir plongé des deux pieds dans un bourbier d'où il lui sera difficile de se relever. Ce qui se passe actuellement à Ghaza est non seulement inadmissible mais aussi honteux pour un peuple qui a tant souffert des affres de l'occupation israélienne, depuis des décennies.