Au quartier dit Chinatown (humat chnaoua) de Bab Ezzouar, qui connut de graves heurts la veille entre des Chinois et des Algériens, ce matin (hier) est très calme. Pas de dispositif particulier. Les commerces sont ouverts et ce qui s'est passé la veille n'est pas évoqué dans les discussions. Dans un café non loin du lieu des affrontements, on préfère parler de l'équipe nationale que de l'événement. À la sûreté de daïra, on ne veut rien dire. On est renvoyé à la cellule de communication de la sûreté de wilaya pour d'éventuels détails. Un commerçant rencontré à côté du lieu des heurts a raconté que cela a commencé le matin. Il a vu le premier accrochage, mais les choses sont rentrées dans l'ordre, dit-il. Sans trop connaître les raisons de la prise de bec, le commerçant a ajouté que dans l'après-midi, c'était reparti, mais cette fois avec violence. Le Chinois, semble-t-il, pris à partie par un commerçant et des habitants du quartier, est allé avant de revenir avec un renfort de ses concitoyens armés de gourdins, de barres de fer et autres matraques pour s'attaquer au commerçant qui a été gravement blessé. On évoquera alors une histoire de stationnement gênant du commerçant chinois et son voisin immédiat, un commerçant algérien, qui lui a demandé de déplacer son véhicule. Trop mince comme raison pour déclencher une bataille rangée ! Certains habitants du quartier et qui n'ont, au vu de leurs discours, jamais digéré l'invasion des Chinois, ont évoqué les mœurs de ces Asiatiques trop nombreux, leur comportement et “leur non-respect des traditions” des habitants locaux. “Il y a des prostituées, ils boivent du vin, leurs femmes sont découvertes”, a affirmé un jeune, la trentaine, barbe et qamis, sans cacher son hostilité à “cet étranger” qui doit quitter les quartiers algériens. Des incidents similaires, mais avec une moindre gravité, ont déjà été enregistrés dans d'autres quartiers de Bab Ezzouar où les Chinois, hormis ceux travaillant dans le bâtiment, sont des commerçants, vendeurs de tissus et de linge qui se sont vite imposés dans les marchés et quartiers actifs. Venus travailler en Algérie, perçus comme des demandeurs de boulot, quelques années après, “ces mangeurs de chat”, comme on les désigne, s'avèrent envahissants. Ce genre de commentaire est légion, mais depuis l'incident d'avant-hier, les commentaires sont devenus acerbes, violents avec des relents de racisme. Les appels à la vengeance, “à la guerre” de libération, au meurtre de tous les Chinois et autres à les renvoyer chez eux ont dominé les réactions sur la Toile. Les Chinois sont traités de tous les noms et de tous les maux, particulièrement par les islamistes qui les accusent de souiller une terre d'islam et de vouloir remplacer le colonialisme occidental. “Le péril jaune”, a réagi un jeune internaute. Le quartier est resté, contrairement à la Toile, pourtant calme. Djilali B.