Après un long silence, au cours duquel elle a laissé l'Ecosse assumer la libération de l'agent libyen Abdelbasset El-Megrahi, la Grande-Bretagne a rompu le silence pour dire qu'elle ne voulait pas qu'il meure en prison. Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Miliband, a fini par mettre fin, hier, au mutisme affiché par Londres face aux reproches des pays occidentaux pour la libération en août dernier par l'Ecosse de Abdelbasset el-Megrahi, condamné dans l'affaire de Lockerbie. Ainsi, le gouvernement britannique “ne voulait pas” qu'Abdelbasset el-Megrahi, le Libyen condamné pour l'attentat de Lockerbie, “meure en prison”. “Nous ne voulions pas qu'il meure en prison”, a donc répondu le chef de la diplomatie aux questions de la BBC suite aux déclarations la veille d'un ancien secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, Bill Rammell. Ce dernier a confirmé qu'il avait dit à un responsable libyen que ni le Premier ministre Gordon Brown ni David Miliband ne souhaitaient qu'El-Megrahi finisse ses jours dans sa cellule écossaise. Le ministre britannique des Affaires étrangères a, cependant, assuré que le gouvernement britannique n'avait effectué “aucune pression” sur le gouvernement écossais en vue de la libération de l'agent libyen, tout en soulignant que la justice écossaise est indépendante de Londres. Dans le même ordre d'idées, il insistera sur le fait que “la libération d'El-Megrahi n'était pas du ressort du gouvernement britannique”. C'était là la réponse officielle de la Grande-Bretagne aux accusations relayées dimanche par le Sunday Times selon lesquelles Londres a accepté d'inclure le Libyen dans un accord de transfèrement de prisonniers avec Tripoli en échange d'un contrat pétrolier entre la compagnie britannique BP et la Libye, d'un montant potentiel de 15 milliards de livres. À ce propos, le Premier ministre britannique Gordon Brown a assuré que la libération par l'Ecosse en août d'Abdelbasset el-Megrahi n'avait fait l'objet d'aucune contrepartie. Ces révélations du Sunday Times, qui se réfèrent à deux lettres échangées entre Londres et Edimbourg, ont obligé les gouvernements britannique et écossais à sortir de leur réserve en publiant, mardi, leur correspondance sur le sujet. Parmi les courriers diffusés, figure le compte-rendu d'une rencontre, le 12 mars, entre des responsables écossais et le ministre libyen chargé de l'Europe. Selon les notes publiées par le gouvernement écossais, ce dernier, révélant une visite de Bill Rammell à Tripoli en février dernier, indique avoir “répété à M. Rammell que la mort de M. Megrahi dans une prison écossaise aurait des effets désastreux sur les relations entre la Libye et le Royaume-Uni”. La même source précise que “M. Alobidi a ajouté que M. Rammell lui avait indiqué que ni le Premier ministre ni le ministre des Affaires étrangères (David Miliband ndlr) ne souhaitaient voir M. Megrahi mourir en prison, mais que la décision sur un transfèrement dépendait du gouvernement écossais”. “C'est ce que j'ai dit”, a confirmé mardi soir sur la BBC Rammell, aujourd'hui secrétaire d'Etat à la Défense. “Je n'ai pas discuté de cela avec le Premier ministre”, a-t-il toutefois ajouté. Pour rappel, El-Megrahi avait été condamné en 2001 à la prison à vie pour l'explosion d'un avion de la compagnie américaine Pan Am au-dessus du village écossais de Lockerbie. Sa libération par l'Ecosse en août a suscité une vive controverse, en particulier aux Etats-Unis, d'où sont originaires la majorité des 270 victimes.