C'est le cauchemar de Washington, Londres et Paris. Les opinions de ces capitales, ne supportant plus de voir le carrousel de cercueils de leurs enfants morts dans une guerre interminable, se sont retournées pour exiger l'abandon pur et simple de l'Afghanistan à son sort. Les harcèlements des talibans sont quotidiens et non seulement ils se soldent par des succès, y compris dans les zones réputées entre les mains des forces atlantiques, mais occasionnent également de la part de ces dernières des "dommages collatéraux". Insupportables par les populations afghanes pour lesquelles la contre-offensive talibane est bienvenue, ne serait-ce que pour débarrasser leur pays des agresseurs occidentaux. Une organisation caritative suédoise vient d'accuser la 10e Division de montagne de l'armée américaine d'avoir saccagé l'hôpital de la province de Wardak, au sud-ouest de Kaboul. La bavure, confirmée par l'officier des affaires publiques au sein de l'US Navy, est significative du climat dans ce pays sur un volcan que les résultats des élections générales (provinces et présidentielles) vont encore enfoncer. Karzaï, le président sortant, s'est donné gagnant, ce que conteste, d'ores et déjà, son principal rival, son ex-ministre des AE qui menace d'ajouter son propre feu. Il en a les moyens : c'est le porte-parole des tribus du nord, importantes en nombre et bénéficiant de soutiens de leurs pendants dans les Républiques asiatiques de l'ex-Union soviétique. Les pieds au mur, Berlin, Paris et Londres ont convoqué une conférence internationale pour "encadrer les progrès" du prochain gouvernement afghan ! Elle aura lieu avant la fin de l'année, les Etats-Unis ont donné leur accord implicite, alors qu'Obama prépare un autre plan de sortie de ce pays où il avait promis d'éradiquer les talibans et où il pensait transférer l'essentiel des troupes américaines stationnées en Irak. La chancelière allemande Angela Merkel et le Premier Ministre britannique Gordon Brown et le président français Nicolas Sarkozy vont pousser les Afghans à reprendre rapidement la responsabilité de leur pays. En Europe comme aux Etats-Unis, l'intervention en Afghanistan est de plus en plus impopulaire après huit ans d'opérations meurtrières pour soutenir un gouvernement accusé de corruption. L'Allemagne, troisième contributeur de troupes derrière les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, est désormais en position d'accusée après une frappe aérienne demandée par l'un de ses officiers qui a fait de nombreuses victimes civiles la semaine dernière. Merkel a de plus en plus de mal à défendre une intervention rejetée par une majorité de sa population, des hommes politiques ont déjà demandé une échéance concernant l'engagement allemand en Afghanistan. Brown a dû lui-même monter au créneau pour défendre la participation britannique à la guerre, critiquée par un de ses conseillers, démissionnaire. En France, 64% de la population est très nettement opposée à la participation imposée par Sarkozy aux opérations en Afghanistan, selon un sondage. Cependant, ni Washington ni les capitales européennes ne parlent de fixer un terme à leur intervention, mais il est clair que les trois grands pays européens veulent pouvoir passer les rênes aux Afghans au plus tôt. Comment ? C'est toute la question, d'autant que l'élection présidentielle du 20 août, entachée de nombreuses irrégularités, n'a rien fait pour arranger les choses. Les travaux de la conférence porteront sur la sécurité, avec l'aide du prochain rapport du commandant de l'Otan en Afghanistan, le général Stanley McChrystal, la gouvernance et le développement. Du déjà vu tout au long du premier mandat de Karzaï qui n'est qu'une simple marionnette des intérêts et stratégies occidentales.