Ce produit de la microfinance doit être adapté aux besoins et aux capacités de remboursement du micro-entrepreneur tout en réduisant les délais d'étude des dossiers. La microfinance évolue de manière lente, mais progressive sur la scène socioéconomique du pays. C'est du moins ce qui ressort de la table ronde autour de laquelle des experts et des cadres spécialisés ont débattu hier au quotidien El Moudjahid. Cet ensemble de dispositifs qui offre de petits crédits, ce qu'on appelle microcrédits, à des familles pauvres pour les aider à conduire des activités productives ou génératrices de revenus leur permettant ainsi de développer leurs PME, évolue progressivement en Algérie. Ce procédé consiste non seulement à octroyer le microcrédit aux pauvres, mais aussi en la fourniture d'un ensemble de produits financiers à tous ceux qui sont exclus du système financier classique ou formel. Toutefois, ce secteur particulier de la finance fait face actuellement à de nombreuses contraintes empêchant son développement en Algérie. Les obstacles ont trait au fait de sa récente introduction en Algérie, c'est-à-dire en 1999. Il s'agit donc d'une étape dans une évolution qui reste à faire pour consolider l'outil du microcrédit comme moyen de développement économique des populations non bancarisées et pauvres. Dans notre pays, l'enjeu étant l'insertion professionnelle des jeunes, plus fortement touchés par le chômage, l'Etat a introduit le microcrédit ainsi que d'autres actions socioéconomiques d'accompagnement de l'économie en transition. Mis en œuvre à l'origine par l'Agence de développement social (ADS), il était considéré comme un outil de traitement social de la pauvreté et de soutien aux petites activités économiques (auto-emploi, travail à domicile, activités artisanales et de services…). Il y a à peine trois ans, le marché potentiel de l'offre de services financiers aux populations à faibles revenus (artisans, commerçants, agriculteurs et salariés), correspond à environ 5 millions de ménages et 150 000 très petites entreprises. En croissance permanente, le secteur informel occupe une place importante. Les besoins des ménages en services financiers de proximité ne sont pas suffisamment couverts. Séparation entre microcrédit et vie sociale Dans le cadre de la lutte contre le chômage et la promotion de la petite entreprise privée, le gouvernement a mis en place trois dispositifs d'appui à la création de petites entreprises au travers d'agences publiques, à savoir l'Angem (Agence nationale de gestion du microcrédit) et l'Ansej (Agence nationale pour le soutien à l'emploi des jeunes) et la Cnac (Caisse nationale d'allocation chômage). Ces dispositifs restent cependant peu accessibles à cause de la lenteur des délais de traitement des dossiers (procédures lourdes, longues, privilèges accordés à quelques-uns) et d'un manque d'intérêt du banquier qui octroie sous convention avec l'ADS le microcrédit. Lors de cette rencontre, il a été évoqué un problème de manque de contrôle de la performance des institutions chargées de la microfinance (IMF). Dans les autres pays, ce sont ces IMF qui vont vers les populations concernées. Dans le nôtre, c'est le contraire qui se produit. L'autre problématique soulevée : les bénéficiaires de ce type de prêts ne font pas de séparation entre microcrédit et vie sociale. En termes plus clairs, le micro-entrepreneur doit faire la différence entre la caisse de son entreprise et celle de la famille. “De plus, ces dispositifs ne sont pas adaptés et ne donnent pas de place à une préparation des populations bénéficiaires à gérer leur microcrédit (faible niveau d'information initiale, pas d'accompagnement après l'obtention). Cela ne fait que renforcer une perception des bénéficiaires par rapport à un argent de l'Etat qui leur est dû sans obligation de remboursement”, souligne-t-on dans une étude réalisée il y a quelques années. Sur un autre registre, la loi sur la monnaie et le crédit ne permet pas à d'autres opérateurs que les banques et établissements financiers de consentir des crédits. La capacité des banques à réaliser une grande masse de microcrédits relève de l'impossibilité et le système a montré ses limites en raison de la faible capacité de traitement des dossiers de microcrédit et de la lenteur des procédures. Or, l'idéal est d'accorder des microcrédits adaptés aux besoins et aux capacités de remboursement du micro-entrepreneur, tout en réduisant les délais d'étude des dossiers. Ces PME nées à partir de ces prêts doivent être également accompagnées pour qu'elles puissent dégager des excédents, rembourser leurs dettes et se développer. Selon un des intervenants, il est grand temps de faire l'évaluation de toutes ces institutions. Autrement dit, il faut analyser les statistiques, entre autres de l'Ansej qui, depuis sa création jusqu'au 31 décembre 2008, a lancé quelque 97 000 projets qui ont créé 295 000 postes d'emploi pour une valeur de 205 milliards de DA. Il faut se demander, aussi, propose-t-il, pourquoi 45% de ces projets (avec ceux de la CNAC) sont recensés dans le secteur des services, alors que l'hydraulique et l'agriculture n'en bénéficient que respectivement de 2% et de 12% ? Par ailleurs, la stratégie du microcrédit s'inscrit dans une logique de service public et seules les administrations telles que l'Ansej… le réalisent avec le concours des banques. Dans ce contexte, il n'est pas surprenant que les bénéficiaires ne remboursent pas. Car leur perception repose sur le sentiment que cet argent de l'Etat leur est dû.