Sur les 32 touristes enlevés dans le triangle Tamanrasset-Illizi-Djanet entre la mi-février et la mi-mars, 14 sont encore entre les mains des ravisseurs. Il s'agit de quatre Suisses, de neuf Allemands — la dixième ayant décédé d'insolation il y a quelques semaines — et d'un néerlandais. C'est en date du 13 mai dernier qu'est intervenue la délivrance du premier groupe d'otages — une dizaine d'Autrichiens, six Allemands et un Suédois — à l'issue d'une offensive de l'ANP sur leur lieu de détention à Amguid, près de Tamanrasset. Dans un communiqué, publié au lendemain de cette libération, l'état-major de l'armée a identifié les ravisseurs comme appartenant au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) de Hassan Hattab. Intervenant le jour même, le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, avait révélé que les otages restants sont détenus par un groupe similaire. L'ANP a localisé leur emplacement dans le massif de Tamelrik à 150 km au Nord de Illizi. De grands renforts militaires déployés sur les lieux ont laissé présager un assaut imminent. De hauts responsables de l'ANP, dont le général Smaïn Lamari, chef du contre-espionnage s'étaient même rendus à Illizi pour superviser le bon déroulement de l'opération. Or, il n'y aura point d'assaut. La configuration géographique de cette région montagneuse abritant d'innombrables grottes et des canyons, était invoquée comme le principal obstacle à une offensive sans accroc. Tenant à récupérer leurs ressortissants sains et saufs, les autorités de Berlin, de Berne et d'Amsterdam ont largement fait pression sur Alger pour l'amener à abandonner définitivement l'option d'un coup de force. Au cours de son dernier séjour à Vienne puis à Strasbourg, en juin, le président Bouteflika a accédé à cette exigence en s'engageant à “offrir une porte de sortie aux ravisseurs. C'est le maximum que je puisse faire”, avait-il indiqué à ses hôtes. Selon des indiscrétions, le chef de l'Etat avait également donné son accord pour que des négociations directes autour d'une rançon soient autorisées entre les pays d'origine des touristes et les preneurs d'otages. Au même moment, la Libye, par la voix d'un des fils d'El-Kadhafi, s'est proposée pour une mission de bons offices. S'étant précédemment distingué par le rôle qu'elle a joué dans le dénouement de l'affaire de la prise d'otages de l'île de Jolo aux Philippines, elle a fait valoir sa disponibilité à offrir l'asile aux ravisseurs. D'aucuns ont cru déceler dans cette offre de service une sollicitation de l'Algérie. En effet, peu après la libération du premier groupe de touristes, le président Bouteflika a effectué un séjour éclair à Tripoli au cours duquel il aurait demandé l'aide de son homologue libyen. Aussitôt, tous les regards se sont tournés vers la Libye, d'autant que sa proximité avec Illizi et Tamelrik laissait entrevoir un probable déplacement des otages et des ravisseurs vers ce pays. Surprise, c'est vers le Mali, à plus de 1 200 km d'Illizi que ces derniers se rendront finalement. Eu égard à la profonde amitié qui le lie à l'Algérie, le Mali a accepté d'accueillir les preneurs d'otages et leurs victimes. Son président Amadou Toumani Touré, a déjà affiché cette disponibilité au tout début de l'affaire des otages du Sahara au cours d'une visite, en avril dernier, à Alger. À ce moment-là, un flou total entourait l'affaire. Multipliant les déclarations contradictoires et les demi-vérités, les autorités algériennes se refusaient à reconnaître qu'il s'agissait bel et bien d'un enlèvement perpétré, de surcroît, par un groupe terroriste. Elles ont également nié l'existence de négociations avec les ravisseurs, n'était le fameux lapsus du ministre du tourisme, Lakhdar Dorbani, lors de son audition par la commission du tourisme et de la culture de l'Assemblée populaire nationale. Mardi dernier, son homologue de l'intérieur continuait à affirmer que les recherches se poursuivaient pour retrouver les touristes alors qu'ils se trouvaient depuis deux jours à Kidal, au Nord du Mali. Au terme de négociations en dents de scie, les ravisseurs ont accepté de rallier cette région avec la promesse de libérer les otages, une fois là-bas. À quel prix ? S. L.