Si le si célèbre Acropole d'Athènes et son tout aussi mythique Parthénon ont été dédiés, aux temps anciens, aux divinités grecques, la Coupole d'Alger a été réservée hier aux légendes contemporaines du football des rives méditerranéennes. Et en termes de mythologie ou de mythe tout simplement, la présence du Roi Zidane suffisait à elle seule à transformer cet après-midi de gala en jour d'histoire, de gloire, de passion et de football-spectacle de très haut niveau. Déjà, à peine ce jour historique avait consommé sa première moitié qu'une effervescence toute particulière caractérisait les alentours de ladite coupole, avec ce dispositif de sécurité aussi draconien et impressionnant que dissuasif annonçait déjà la couleur : bleue ! Un bleu “sécuritaire” qui fera comprendre, sans ambages, à ceux qui rêvaient de voir les “Bleus” champions du monde 1998 et d'Europe 2000 sans pour autant détenir le fameux sésame donnant droit à une présence parmi les chanceux qu'il leur était tout simplement impossible de troquer leurs places sous le bleu céleste pour une présence sous le toit bien haut et tellement illuminé de cette coupole qui allait s'avérer par la suite un mini-théâtre des rêves. Et les marchands de rêves, fussent-ils figures emblématiques du football algérien post-indépendance ou membres de la glorieuse EDF des années Jacquet, ils ne tarderont pas à arriver sur les lieux de l'évènement, escortés comme probablement jamais des sportifs en partance pour l'esplanade du 5-Juillet ne l'ont été. Premiers sur les lieux, peu après 14h, les protégés d'Ali Fergani mesurèrent d'emblée l'ambiance qui y régnait. Près d'une soixantaine de minutes après, ce sont les Français qui firent bouillonner tout le pourtour “sécuritaire” de la Coupole. Sitôt arrivés, sitôt acheminés vers les vestiaires ultra-protégés de l'enceinte. Même le propre fils de Zidane, le bien nommé Enzo, n'aurait pu approcher son idole de père, tant la garde rapprochée qui lui était allouée avait tissé autour de sa personne une infranchissable muraille humaine. La salle se remplissant au fil des minutes, c'est tout d'abord les rappeurs Sinic et Rim-K (du Groupe-113) qui feront monter la température, sans même chanter, mais en se prêtant avec gentillesse et amabilité au jeu des photos souvenirs dans lequel les jeunes et moins jeunes Algériens présents de ce côté-ci de la mini-tribune se sont montrés promptement doués. Etoile et croissant du drapeau national tatoué sur sa main gauche, Sinic, qui s'avèrerait être un proche parent de Karim Ziani, s'est d'ailleurs montré très charmé par “l'excellente et conviviale ambiance qui règne et qui n'est que le prolongement logique de ce qu'a vécu le peuple algérien depuis l'entame de la campagne victorieuse en éliminatoires de Coupe du monde”. “Pour avoir vécu tous ces moments de pur bonheur des deux rives de la Méditerranée, je peux vous dire que le football s'est avéré être le meilleur moyen de rapprocher non seulement tous les Algériens d'ici et d'ailleurs, mais aussi et surtout de rassembler davantage les peuples français et algérien. Et ma foi, ce tournoi de l'amitié est une excellente aubaine et un moyen sûr de renforcer les liens entre les deux peuples et les deux communautés”, soulignera en ce sens, Sinic à Liberté, au cours d'un collégial brin de causette. Le temps s'égrenait et l'apparition tant attendue de la star mondiale et adulée sur les terres de ses aïeuls plus qu'ailleurs donnaient des airs de suspense à cet après-midi pas comme les autres. Le semblant de calme qui accompagnait les gardiens de but Bernard Lama et Lionel Charbonnier dans leur démarche au sortir du mini-tunnel menant au terrain laissera, ensuite d'abord place à des applaudissements nourris saluant l'apparition de l'inégalable Aimé Jacquet, avant qu'une assourdissante standing-ovation annoncera l'arrivée, sur le terrain de l'amicale empoignade en trois actes entre footballeurs des deux rives, du Miss't'mourth de l'étape, Zinedine Zidane. L'horloge affichait exactement 15h57. Il était là, bien là, au milieu des stars algériennes et françaises à s'échauffer le plus normalement du monde, timidement, lui, l'un des meilleurs footballeurs de toute l'histoire de cette discipline sportive. Pour mettre un peu plus d'ambiance dans ce brasier déjà enflammé et qui n'avait d'yeux que pour son invité de marque, le chanteur Cheb Toufik, micro en main, s'essayera au play-back, raté certes, mais accompagné de quelques pas de danse qui compenseront ce ratage vocal, mais surtout de ce geste symbolique en direction du chouchou Zizou, auquel il offrira une écharpe aux couleurs nationales que l'icône mondiale laissera quelques instants autour du cou avant d'en faire une originale ceinture, plus commode d'ailleurs aux exercices d'échauffement auxquels il s'adonnait. Cette émouvante scène de Zidane “l'Algérien” avait à peine marqué cette huitième minute après les 16h que comptait déjà cette journée historique qu'un second essai du même Cheb Toufik accompagné, avec tout autant d'insuccès vocal par Hassiba Amrouche, parviendra une nouvelle fois à draper Zinedine Zidane des couleurs nationales, au grand bonheur d'un public qui scandait inlassablement les habituels slogans à la gloire du pays, entremêlés en la circonstance par des “Zizou Zizou” qui tonnaient à fortes doses de décibels dans cette ambiance du tonnerre. Le coup d'envoi de la première rencontre au programme ayant été donné par un prestigieux quatuor Maouche-Soukhane-Hidalgo-Ged, les Drid, Hemdani, Zerrouki, Gaïd et Belloumi s'attaqueront, certes, avec de nobles intentions au défi de mettre à terre les Lama, Blanc, Deschamps, Diomède et Zidane, mais le talent d'un ZZ Top toujours aussi stratosphérique en matière de technique fera, plus rapidement qu'on l'aurait pensé, pencher la balance côté français. Un huit à trois (8-3) des plus révélateurs avec un doublé de Zidane, un autre de Thuram et des buts de Laigle, Dacourt et un contre-son-camp de Zerrouki, contre trois bijoux de Belloumi, Ferhaoui et du même Zerrouki scelleront ainsi le sort de cette première qui aura, surtout, servi d'amuse-gueule avant le grandiose spectacle qu'allait nous réserver la finale. Disposant de leurs compatriotes par un 7-1 sans appel, les coéquipiers de Haniched, avec une triplette Haddou-Tasfaout-Menad de gala gagnèrent, pour le compte de la seconde manche programmée, le droit de se mesurer à l'Everest Zidane. Et pour une finale, cette ultime étape de ce mémorable tournoi de l'amitié fut tout simplement un must en matière de spectacle, un hymne à la technique et au football-champagne avec, comme chef d'orchestre de ce récital en salle, un inimitable Zinedine Zidane qui ensorcellera, de sa magie jamais démentie, une assistance séduite d'avance et follement éprise de son héros du jour et de son as de… cœur. Alors quand bien même l'organisation, boiteuse, favorisait vers la fin une anarchie et l'inaccessible quête d'une photo-souvenir, d'une poignée de main ou d'une furtive pose avec le Roi Zidane, la magie a quand même opéré. Et opérera toujours avec un tel alchimiste des temps modernes, capable à lui tout seul de transformer un après-midi hivernal en un fort moment doré de chaleur et de communion et une simple coupole en un semblant d'Acropole.