La proposition de loi, portée par plus de 120 députés majoritairement d'obédience FLN, est parvenue au gouvernement. Son sort sera, néanmoins, scellé en fonction des intérêts politiques au niveau interne et des relations bilatérales avec la France. Le bureau de l'Assemblée populaire nationale a avalisé, il y a quelques jours, la proposition de loi, initiée par un groupe de députés et portant sur la criminalisation de la colonisation de l'Algérie par la France durant 132 ans. Après avoir rejeté, une première fois, la proposition de loi pour vice de forme, le bureau de l'APN l'a jugée conforme, dans le fond et dans la forme, à la réglementation en vigueur, une fois que ses observations seront prises en charge par l'auteur de la proposition de loi, l'élu d'obédience FLN Moussa Abdi, et les 120 députés qui l'ont soutenu dans sa démarche. Dans le document, ces derniers veulent reconnaître à la France la qualité d'auteur de crimes contre l'humanité, commis durant la période de colonisation et surtout donner aux autorités algériennes la latitude, éventuellement, de traduire ce pays devant le Tribunal pénal international. Composée de 20 articles, la proposition de loi prévoit une disposition qui rend tributaires les relations futures entre les deux pays de “la reconnaissance de ces crimes par la France, dont le peuple algérien tient à recevoir des excuses, et (de) la réparation des préjudices moraux et matériels causés durant la colonisation”. Bien que cette cette proposition de loi soit justifiée, au regard de la majorité des Algériens, notamment eu égard à la promulgation, en février 2005, d'une loi française qui donne une connotation positive au passé colonial français, certains députés, dont M. Khendak, élu RCD et l'un des neuf vice-présidents de la première chambre parlementaire, doutent de son aboutissement. Selon lui, un certain cafouillage règne entre les défenseurs de la proposition de loi, majoritairement élus FLN, le groupe parlementaire et la direction de ce parti. Et puis, de son avis, “cette loi touche trop d'intérêts pour qu'elle puisse un jour être promulguée”. Les relations algéro-françaises, déjà assez conflictuelles, risquent, en effet, de recevoir un coup de froid fatal si ladite loi devenait effective. Dès que l'information relative à son dépôt auprès du bureau de l'APN a été rendue publique, de hauts responsables français se sont insurgés contre sa teneur. Interpellé à l'Assemblée nationale française sur le propos, Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères et européennes, a répondu qu'“il s'agit d'un projet qui, s'il était adopté par la représentation nationale algérienne — ce qui est loin d'être le cas —, serait bien évidemment regrettable”. Son collègue de l'Immigration, Eric Besson, a estimé que cette question relève “de sujet sensible, alors qu'il reste encore des cicatrices”. Le secrétaire d'Etat à la Défense et aux Anciens combattants, Hubert Falco, a déclaré, pour sa part, que “cette initiative, portée par 125 députés algériens, est particulièrement inquiétante et incompréhensible”.