La valeur marchande du cannabis, intercepté depuis janvier 2010 par les gendarmes du GGF et l'armée, est estimée à près de 100 milliards. L'affaire saillante, liée à la saisie de plus de 8 tonnes de kif et qui a conduit à l'arrestation de 6 narcotrafiquants activant pour le plus grand réseau de trafic de stupéfiants, a mis à nu la nouvelle méthode de convoyage de la drogue. L'affaire de saisie des 8 tonnes de drogue à la frontière algéro-marocaine continue d'alimenter l'actualité sécuritaire dans la capitale de la Saoura, Béchar. Passant du simple mode d'interception et de saisie au mode de renseignements et de démantèlement de réseaux constitués de barons, de guides et d'accompagnateurs, donc de complices, les services de sécurité algériens marquent des points et enregistrent de grandes avancées dans la guerre déclenchée, depuis des années, contre les cartels internationaux de la drogue basés dans le Rif marocain et, au-delà, dans les capitales européennes et moyen-orientales. Et si le phénomène du blanchiment d'argent et de la connexion de ces réseaux avec le terrorisme a été établi avec ce trafic, il est évident que l'immigration clandestine est également mise à profit par les narcotrafiquants pour effectuer des recrues, voire des boucs émissaires, afin d'acheminer leur marchandise via la bande frontalière algéro-marocaine et les pays du Sahel, des pays où Al-Qaïda est visiblement bien implantée. Pour preuve, l'opération menée le 27 février dernier par les GGF de l'escadron 103 de Zeghdou, dépendant du 10e GGF de Hassi Khebi, connaît des développements à même de déceler des liaisons insoupçonnables du crime transfrontalier. En effet, les gendarmes du GGF, en embuscade, ont opéré suite à de précieux renseignements faisant état d'un convoyage de drogue à bord de 4 véhicules de marque Toyota Station en provenance du Maroc. Selon le chef d'état-major du groupement de la Gendarmerie nationale, le commandant Abdelouahid Chérifi, les tirs de sommation des gendarmes et des militaires n'ayant pas persuadé les narcotrafiquants de s'arrêter, un violent accrochage s'en est alors suivi. Les véhicules, des 4X4, circulaient séparément avec la bénédiction des guides qui se fient à la lumière de la lune et aux légendaires constellations du ciel, d'où la difficulté de cerner le convoi éparpillé dans ces reliefs désertiques. Cela sent le “joint” du Rif au… Mali ! L'occupation du terrain par les services de sécurité ne prêtait point de chance aux convoyeurs pour faire machine arrière, comme à l'accoutumée. C'est alors que deux blessés ont été enregistrés parmi les trafiquants, dont un Malien. Un autre étranger, de même nationalité, sera arrêté en compagnie de trois Algériens lors d'une vaste opération de ratissage. Soumis à l'interrogatoire de routine, l'un des Maliens a tenté de se faire passer pour un mineur, âgé seulement de 17 ans. Mais il avouera, après des investigations poussées, qu'il a bel et bien la trentaine passée et qu'il active pour le compte d'un important réseau international. Et ce n'est pas fini ! La marchandise, destinée à l'Europe et au Moyen-Orient, devait être transbordée au… Mali ! Fortement payés, à raison de 100 000 dinars pour l'accompagnateur, de 300 000 dinars pour le chauffeur, selon la distance parcourue, et de 100 millions pour le guide, les convoyeurs bénéficient de largesses à la frontière marocaine où les gardiens du makhzen font l'impasse sur la nature des produits transportés. C'est que même les Maliens sont, apparemment, entraînés sur le territoire marocain aux armes de guerre pour faire face au dispositif des GGF et de l'armée qui veillent sur la souveraineté de nos frontières. Bilan de l'opération : 6 arrestations, saisie de plus de 8 tonnes de drogue, d'un fusil- mitrailleur, d'une kalachnikov, de munitions, d'une paire de jumelles, de 2 téléphones cellulaires de marque Thuraya et d'un GPS. Deux autres kalachnikov, dissimulées sur le lieu de l'accrochage, seront également découvertes par les services de sécurité le lendemain de l'opération. En fait, le groupe était constitué de 9 personnes. En effet, selon les aveux des individus arrêtés, 3 autres narcotrafiquants sont toujours en fuite. Des développements qui pourraient aboutir à d'importantes conclusions et qui permettraient aux enquêteurs d'avancer dans l'affaire actuellement en instruction. La valse marocaine étant connue par le monde entier, à se fier aux rapports des institutions internationales et autres organismes chargés de la lutte contre les stupéfiants qui incriminent le royaume chérifien (le Maroc demeure l'un des pays du monde où la culture illicite de cannabis est très répandue, selon le rapport annuel de l'Organe international de contrôle de stupéfiants pour 2009) ; cette filière représente la première biliére dans le monde avant le pétrole et les armes. Rien que pour les deux récentes saisies opérées à Zeghdou et à Hassi Khebi, la valeur marchande est estimée à près de 100 milliards de DA. En 2008, pas moins de 26 tonnes de kif traité, représentant une valeur de 260 milliards, ont été détruites. En 2009, plus de 64 tonnes de cannabis, d'un montant de plus de 640 milliards, ont également été détruites par les services compétents. C'est dire l'importance que les Maliens s'accordent à donner à un marché qui profite beaucoup plus au Maroc qu'à leur base en acceptant de transformer leur frontière en passoire et leur sol en transit. Ce n'est pas la première fois que des Africains sont mis à contribution dans l'acheminement de la drogue dans la zone chaude du Sahel. Ce paramètre, une préoccupation sécuritaire de premier ordre dans la lutte contre le crime transfrontalier, a sensiblement concouru dans la redéfinition de la ligne rouge au niveau des frontières terrestres, notamment dans le Grand-Sud et le Sud-Ouest. La drogue, entre maladies du Sahel et “narco-dissidence” Parmi les 6 narcotrafiquants arrêtés, deux sont soupçonnés de traîner le sida. Une pure intox qui a vite fait le tour de la Saoura. Les vents de sable aidant, la rumeur ira jusqu'à annoncer l'hépatite C ! Pourtant, toutes les mesures sanitaires ont été prises dès l'arrestation de ces mis en cause, dont un Malien et un Algérien suspectés d'être infectés par la syphilis. “Suspectés”, nous précise-t-on à Béchar. Des analyses approfondies sont en cours à l'Institut Pasteur. Point de sida et d'hépatite C, le trafic de drogue est aussi assimilé au “transfert” des maladies infectieuses du Sahel, des pathologies touchent souvent des immigrés clandestins, des narcotrafiquants exposés au climat de ces régions désertiques. La “narco-dissidence” en vogue, en sus du trafic d'armes, des enlèvements d'étrangers, de terrorisme et de transit de tous genres de gangs, le Sahel, une poudrière permanente, “transfère” ses malheurs sur la bande frontalière, menaçant, du coup, la sécurité des pays voisins, dont l'Algérie. Les barons maliens, des reliefs de scorpions aux geôles algériennes Les barons maliens arrêtés, au même titre que les quatre autres chauffeurs, guides et accompagnateurs, ont été placés sous mandat de dépôt. La peine ne sera que lourde au vu des circonstances aggravantes, dont la transgression de la frontière, le convoyage et la commercialisation de la drogue, ainsi que le trafic et l'usage d'armes de guerre. Les deux narcotrafiquants, blessés lors du dernier accrochage et suspectés par ailleurs d'être atteints de syphilis, ont quitté l'hôpital de Béchar et mis, eux aussi, derrière les barreaux. Cette grande opération aura le mérite de donner un autre ton à la lutte contre les stupéfiants à la bande frontalière algéro-marocaine et d'identifier de nouveaux réseaux basés dans un pays voisin qui a récemment libéré deux terroristes du GSPC, outrepassant, du coup, les procédés de bon usage dans la lutte antiterroriste internationale. Cela va sans dire que la mainmise sur les deux barons maliens de trafic de drogue permettra aux services de sécurité algériens de remonter leur filière. Une chose est sûre, les éléments du GGF de Béchar et l'armée auront, encore une fois, donné un coup de pied dans la fourmilière au sein d'une organisation qui défie des reliefs de scorpions pour tenter de souiller l'image de la Saoura et d'empoisonner l'Algérie. Un autre groupe intercepté aux frontières Un groupe de narcotrafiquants, qui circulait à bord de deux véhicules 4X4 de marque Toyota Station, a été intercepté, jeudi aux environs de 9h, au niveau de Hassi Khebi, par les gendarmes du GGF et une unité de l'armée en embuscade. Selon les premiers éléments d'informations, ces véhicules se dirigeaient vers le territoire marocain afin de s'approvisionner en kif traité. Devant le refus d'obtempérer aux tirs de sommation, les services de sécurité ont réussi à immobiliser le premier véhicule. Pris de panique, le chauffeur a rejoint ses acolytes avant de rallier le territoire marocain. Trois chargeurs pour kalachnikov ont été découverts à bord de la Toyota abandonnée au niveau de la bande frontalière algéro-marocaine. Ce qui suppose que ces narcotrafiquants, probablement en provenance du Mali, devaient récupérer des armes de guerre et le cannabis au Rif marocain.