Plus de 64 tonnes de drogue ont été saisies en 2009. Les narcotrafiquants ont changé de mode opératoire, passant du simple acheminement au convoyage armé. Les GGF ont affronté 15 opérations armées. La valeur des drogues saisies est estimée à plus de 2 000 milliards de centimes. Les gendarmes, eux aussi, sont passés à un autre cap dans la lutte contre le crime organisé, en général, et contre la drogue, en particulier. Les services de la Gendarmerie nationale ont réussi à déjouer l'installation de laboratoires de traitement de drogues dures et d'héroïne en Algérie et de champs de culture de pavot et d'opium. C'est ce qu'a révélé, hier, le directeur de la Police judiciaire au commandement de la Gendarmerie nationale (CGN), le colonel Djamel Zeghida, lors d'un point de presse annuel consacré au crime organisé. Qualifiant le fléau d'inquiétant pour le pays, notamment ses répercussions sur les plans économique et social, M. Zeghida dira que les réseaux internationaux basés en Europe allaient profiter des tentatives de semence des drogues dans notre pays pour ériger des officines de drogues dures et transformer l'Algérie en véritable plaque tournante de trafic de stupéfiants. “Nous avons déjoué dès le départ ces tentatives grâce à notre travail d'analyse et de vigilance. Mais je tiens à préciser une chose, l'Algérie est un pays de transit et non de consommation, encore moins de culture de résine de cannabis. Il y a une évolution dans le mode opératoire dans le convoyage de la drogue depuis le Maroc, en passant les pays du Sahel, vers l'Europe et le Moyen-Orient. Nous avons projeté une saisie de 60 tonnes et nous avons finalement atteint les 64,3 tonnes fin 2009. C'est qu'à notre niveau, mais aussi au niveau des GGF, en sus de la contribution des unités de la Gendarmerie, tous les moyens humains et matériels ont été déployés pour freiner ce phénomène qui empoisonne la société. Ça nous fait mal au cœur, mais nous sommes là pour barrer la route aux barons de la drogue !” explique encore M. Zeghida. Celui-ci révélera que sur les 3 253 affaires constatées en 2009, soit plus de 27% des affaires liées au crime organisé, 4 977 mis en cause ont été interpellés, dont 3 860 pour commercialisation et consommation de kif traité. Sur ce chiffre, on retiendra 3 800 personnes placées sous mandat de dépôt. “Ce qui est malheureux, même si la quantité saisie à l'intérieur du pays est minime, c'est l'implication de jeunes lycéens et d'étudiants dans la consommation de la drogue. Le phénomène persiste et devient vraiment inquiétant”, regrette M. Zeghida. En revanche, il revient sur le mode opératoire des narcotrafiquants qui recourent aux opérations armées afin de minimiser les pertes et assurer le convoyage ou le retour à la source du maximum de cannabis. Il explicitera, à ce propos, que les gendarmes, eux aussi, ont changé de tactique afin d'intercepter même les fuyards. En effet, en plus des embuscades camouflées, les éléments déployés en opération dressent plusieurs dispositifs en profondeur et laissent les convoyeurs tomber dans le piège. D'ailleurs, plusieurs courses poursuites ont abouti, notamment dans le Sud, à la saisie de tonnes de drogue dans des véhicules abandonnés ou immobilisés suite à des échanges violents de tirs entre GGF et convoyeurs armés jusqu'aux dents. Des moyens héliportés ont souvent été sollicités afin de pénétrer des reliefs accidentés et dangereux pour déjouer l'introduction du kif traité sur le sol algérien. Ce qui explique un taux de croissance de plus de 113% dans la saisie de drogue, dont 73% dans la région de Béchar et de Tindouf. Autrement dit, plus de 52 tonnes saisies étaient destinés à l'Europe et au Moyen-Orient, alors que seulement 115 kg ont été saisis à l'intérieur du pays. “Les narcotrafiquants affichent une grande détermination en recourant aux armes de guerre, pour la sécurisation de leurs convois face aux dispositifs des unités des gardes frontières. Cette menace s'est illustrée par les accrochages armés enregistrés avec ces narcotrafiquants (15 en 2009/4 en 2008). Durant l'année 2008, il a été récupéré 16 véhicules, 2 FM/PK, 4 PM/AK, 4 téléphones portables Thuraya et un GPS. Par contre, durant l'année 2009, l'interception des convois de narcotrafiquants a permis la récupération de 42 véhicules, 4 FM/PK + 7 PM/AK, 16 téléphones portables Thuraya, 3 GPS, 45 970 paquets de cigarettes et 2 motos”, révèle le commandant Mounir Merouche. Le verrouillage des frontières ouest et sud-ouest, en plus des dispositifs placés sur les routes, a abouti à l'arrestation de centaines de dealers et de consommateurs. Y compris, après un travail de renseignements, les perquisitions de domicile, comme c'est le cas de l'affaire des 5,5 tonnes saisies au port d'Alger, ont abouti à la récupération de centaines de kilos et à la saisie conservatoire de richesses et de biens. Trafic de devises : plus de 500 millions en euros saisis sur les routes Pas moins de 70 affaires ont été traitées en 2009 et ont conduit à la saisie de plus de 500 millions en monnaie européenne et 21 165 dollars US. “Ce phénomène, enregistré notamment au niveau des wilayas de l'est du pays, est dû principalement à l'acheminement des devises vers l'étranger pour éviter de passer les circuits réglementaires, afin d'échapper au fisc, porte ainsi un grave préjudice au Trésor public. Les criminels utilisent les véhicules de luxe, à l'intérieur desquels, ils dissimulent (dans des caches aménagées) les sommes de devises à transférer. Ce type de criminalité, qui a connu un accroissement considérable, a fait l'objet d'une orientation spécifique, afin de renforcer les mesures de lutte contre ce phénomène”, a expliqué le commandant Mounir Merouche. Celui-ci explique que ces infractions sont souvent constatées en période de grandes vacances et sur des personnes qui circulent à bord de voitures de luxe et insoupçonnables. Au plan du trafic de monnaie, 118 affaires ont été traitées en 2009, soit une baisse de 9,23% par rapport à 2008, ayant abouti à l'arrestation de 179 personnes et la saisie de 4 829 fausses coupures en monnaie nationale et 310 autres fausses coupures en euros. Le faux et usage de faux s'ajoute à ce lot de trafic avec 9,38% de la criminalité organisé, soit une baisse de 4,60% par rapport à 2008. La falsification des documents administratifs en 2009 a également connu une baisse de 3,24%. Le trafic de véhicules, lui aussi, a enregistré 401 affaires, notamment dans les régions de Aïn Defla (47), El-Tarf (36) et Souk-Ahras (33). En ce sens, révèle M. Merouche, 655 personnes ont été arrêtées, alors que plus de 320 véhicules ont été saisis. Toutefois, la contrebande vient en deuxième position dans le crime organisé avec 3 989 affaires traitées, ce qui représente 33,42% de la criminalité, et 2 034 personnes arrêtées. Les saisies opérées par la Gendarmerie nationale frôlent l'irréel : 481,591 tonnes de produits alimentaires, plus de 88 400 articles d'effets vestimentaires, plus de 3 000 têtes de cheptel, 7 312 bouteilles de boissons alcoolisées, plus de 1 500 000 litres de carburant, 962 415 paquets de cigarettes, 687 véhicules et 13 334 911 pétards. La corrélation entre les réseaux étant établie, le colonel Zeghida dira que le blanchiment d'argent est présent là où la contrebande sévit. Bilan final : 11 936 affaires traitées en 2009, contre 12 119 affaires en 2008, soit une baisse de 1,51%, et 8 368 personnes arrêtées, contre 20 338 en 2008, soit une baisse de 9,68%.