Un ordre, signé le 13 octobre 2009 par le commandant des forces armées israéliennes de Cisjordanie, devrait entrer en vigueur à partir d'aujourd'hui et pourrait entraîner l'expulsion ou l'arrestation de dizaines de milliers de Palestiniens. “L'armée est prête à appliquer cet ordre qui ne concerne pas les Israéliens”, a confirmé un porte-parole de l'armée israélienne, sans donner davantage de précisions. Outre les expulsions, cet ordre prévoit jusqu'à sept ans d'emprisonnement, assortis d'une amende de 7 500 shekels (l'équivalent de 150 000 DA) à l'encontre des personnes visées. Il concerne les Palestiniens détenteurs d'une carte d'identité avec une adresse dans la bande de Gaza ou qui sont nés dans ce territoire, ainsi que leur descendance. Israël a établi un blocus strict sur cette enclave contrôlée par Hamas depuis 2007 et empêche ses habitants de se rendre en Cisjordanie depuis la deuxième Intifada en 2002. Le décret militaire vise aussi les Palestiniens nés en Cisjordanie mais qui ont perdu leur statut de résident après avoir séjourné à l'étranger, par exemple. Il touche également les conjoints d'origine étrangère des habitants de Cisjordanie. Ce texte amende un ordre de 1969 destiné alors à lutter contre les “infiltrés” venus des pays voisins. La notion d'“infiltré” est désormais élargie à toute personne non détentrice d'une autorisation israélienne. En vertu de ces nouvelles dispositions, quiconque est appréhendé en Cisjordanie sans un permis israélien risque l'expulsion sous trois jours, voire un emprisonnement et une amende. L'armée a affirmé que la loi permettait déjà d'expulser les personnes en séjour “illégal”, les nouvelles consignes ne faisant que renforcer la supervision judiciaire de la procédure. Jusqu'à présent, les tribunaux civils israéliens empêchaient en général ces expulsions. Mais le décret prévoit que les dossiers seront désormais soumis à la juridiction de tribunaux militaires. Plusieurs organisations israéliennes des droits de l'homme ont saisi le ministre de la Défense Ehud Barak pour réclamer l'annulation de cet ordre. Elles considèrent que les dispositions du texte sont si floues que toute la population palestinienne de Cisjordanie est virtuellement concernée, les autorisations nécessaires n'étant pas clairement définies. “Cet ordre fait partie d'une série de mesures prises par l'armée en vue de vider la Cisjordanie des Palestiniens, notamment en les transférant vers la bande de Gaza”, a même dénoncé un membre de l'ONG Gisha. Le durcissement de la condition palestinienne prévu par cet ordre inique vient s'ajouter aux multiples provocations du gouvernement de Netanyahu, à l'instar du vaste projet immobilier de Jérusalem-Est, qui a compromis pour longtemps l'espoir d'une reprise des pourparlers de paix. La stratégie des responsables israéliens, forts de la complaisance de leurs alliés occidentaux, est désormais claire. Ils ne veulent pas d'un processus de paix qui ne se déroule pas selon leur propre schéma et qui ne satisfasse pas leurs ambitions à la fois territoriales et stratégiques. À Jérusalem-Est, comme dans le reste de la Cisjordanie, ils entreprennent tout, dans l'illégalité la plus totale, pour changer les équilibres démographiques à leur profit, ce qui rendra les négociations plus complexes et certaines solutions quasiment irréalisables. Nul ne peut prétendre ignorer la démarche et ses desseins. À commencer par Washington qui, si ce décret venait à rentrer en application, subirait son troisième camouflet en l'espace de quelques semaines.