David Poujadas, le journaliste vedette du “20 heures” de France 2, a diffusé, mardi dernier, un reportage consacré à une institution éducative privée, rattachée à l'Eglise traditionaliste, dans le cadre de son émission périodique de début de soirée, “Les infiltrés”. “Résultat d'un an de tournage et d'enquête dans un établissement de Bordeaux accueillant 80 élèves, répartis sur toutes les classes allant du primaire jusqu'à la terminale, le reportage est décapant. À vous donner froid dans le dos. Les enseignements sont ponctués d'entraînements dignes de ceux auxquels sont soumises les unités d'élite des armées, avec une prééminence pour les sports de combat. Il ne s'agit pas d'entraînements de self-défense mais de techniques résolument offensives destinées à détruire “les juifs et les musulmans”, qui souillent cette bonne terre chrétienne de France. Un vrai travail d'endoctrinement se fait le long des séances d'entraînement assurées par des militaires à la retraite. L'antisémitisme et l'islamophobie les plus crasses, additionnés à la haine viscérale de la République et de la laïcité, constituent les fondements philosophiques de l'enseignement dispensé dans cette école, qui prône le retour – pas moins que ça ! – à la chrétienté française médiévale. Avec, en prime, l'enseignement d'une histoire revisitée, qui déplore par exemple, que le maréchal Pétain n'ait pas exécuté le général de Gaulle… pour désertion ! Interrogé sur ces questions, un responsable de l'établissement, dignitaire de l'Eglise traditionaliste française, a tout assumé et a développé un discours digne des “Chemises grises” d'Adolphe Hitler, dans lequel la haine du juif n'a d'égale que celle du musulman. L'Eglise traditionaliste, qui n'est rien d'autre qu'une Eglise intégriste, gère plusieurs dizaines d'établissements de ce genre en France et elle peut même se targuer d'une certaine légitimité depuis que le pape Benoît XVI a décidé sa réintégration controversée dans l'Eglise catholique. L'émission a été d'autant plus opportune qu'elle intervenait au lendemain de deux évènements aussi inquiétants qu'inhabituels. La veille, dans la nuit, une mosquée d'Istres a été copieusement mitraillée et les enquêteurs ont relevé des dizaines d'impacts de balles, qui fort heureusement n'ont pas fait de victime. Dans la même nuit, c'est une boucherie hallal qui a été mitraillée à son tour dans un quartier de Marseille. Si les profanations de cimetières et de lieux de culte juifs et musulmans sont signalées sporadiquement en France, c'est, par contre, la première fois qu'il est fait usage d'armes à feu dans ce genre d'expéditions. Intervenant dans un contexte où le débat sur la burqa fait rage, alors même qu'un intégriste musulman de Nantes, soupçonné de polygamie, fait l'ouverture des journaux télévisés et bénéficie d'une publicité inespérée pour lui, l'enquête de l'émission “Les infiltrés” tombait à point nommé. Elle vient rappeler au moins deux choses au gouvernement français. D'abord si l'intégrisme islamiste est une réalité en France, il est relativement marginal même si, il faut en convenir, il se développe. Encore faut-il rappeler que c'est un phénomène relativement récent auquel l'accueil massif de dirigeants et de militants de l'ex-FIS dans l'Hexagone, sous François Mitterrand, n'est pas étranger. Elle rappelle ensuite que l'intégrisme islamiste n'est pas le seul à sévir dans le pays et que tous les intégrismes exposent la société à un égal danger. L'antidote à tous les intégrismes est l'application stricte des lois de la république et des exigences de la laïcité. Quand on condamne quelqu'un pour polygamie, par exemple, il n'est pas utile de pointer du doigt sa religion. Ce n'est pas la motivation de l'infraction qui est condamnée mais l'infraction elle-même. Si le suspect de Nantes venait à être confondu de polygamie, il devrait être condamné, conformément aux lois de la république, qu'il soit musulman, mormon, ou autre.