Il s'agit de savoir si son départ procède d'une abdication définitive sous le couvert de soins urgents ou d'une manœuvre qui lui permettrait de réaliser de loin quelque dessein qu'il ne pouvait plus servir à l'intérieur du pays. Abassi Madani a quitté l'Algérie, jeudi dernier. La nouvelle est à la fois bonne et mauvaise. Bonne, parce qu'il est toujours heureux que les fossoyeurs avérés d'un pays se résignent à l'exil. Mauvaise, parce que l'exil est quelquefois le lieu où peuvent se tramer des complots qui, lorsqu'ils sont soutenus de l'intérieur, peuvent faire mouche, peuvent faire mal. Dans le cas du n°1 du FIS dissous, il s'agit donc de savoir si son départ procède d'une abdication définitive sous le couvert de soins urgents ou d'une manœuvre qui lui permettrait de réaliser de loin quelque dessein qu'il ne pouvait plus servir à l'intérieur du pays en raison des interdits auxquels il était soumis depuis sa remise en liberté, le 2 juillet dernier. À Doha, au Qatar, où il a fait escale, Abassi a été assez éloquent : “Ma prochaine destination est, si Dieu le veut, Kuala Lumpur…” Sans s'attarder sur son état de santé, il ajoute : “je souhaite ne pas mourir avant de voir l'Algérie sortir du tunnel”, puis : “l'heure d'un règlement du problème algérien a sonné.” Il ne faut pas se faire d'illusion, Abassi Madani n'a pas abdiqué et c'est lui-même qui nous le signifie en affirmant qu'il a quitté Alger “sans aucune condition ou engagement, en dehors de son engagement envers la cause du peuple algérien”. Il s'agit vraisemblablement de la même cause que Abdelaziz Bouteflika défend lors de ses visites à l'intérieur du pays : “la concorde nationale”. Il faut donc s'attendre à une contribution du premier responsable du FIS dissous à la politique de Bouteflika. Une contribution qu'il apporterait depuis la Malaisie, dont un responsable politique a été reçu à Alger la semaine dernière par le même Abdelaziz Bouteflika. Que fera donc Abassi à Kuala Lumpur ? Et quel soutien pourrait-il apporter à Bouteflika dans sa quête d'un second mandat ? Un plaidoyer contre l'institution militaire qui ne semble pas agréer le patron d'El-Mouradia ? Possible. Les souaïdia et autres ont déjà préparé le terrain. Durant le mandat du même Bouteflika. Pourquoi Bouteflika aurait-il senti le besoin de s'appuyer sur le témoignage de Abassi ? Parce qu'il sait qu'il risque de subir les conséquences “électorales” d'un autre témoignage, toujours possible, celui de Rafik Abdelmoumène Khalifa. Abassi se révèle donc comme un soldat de Bouteflika, en guerre contre l'institution militaire. S. C.