Le numéro un de l'ex-FIS, après deux mois de «soins» en Malaisie, a décidé de passer officiellement à l'action. Abassi Madani est arrivé hier à Doha, capitale qatarie. Cette seconde étape, après la longue escale malaisienne, durant laquelle il aurait eu des entretiens avec Bouteflika en personne, le leader de l'ex-FIS ne s'encombre d'aucune considération pour justifier sa présence au pays d'Al-Jazira. Il ne se trouve pas au Qatar pour des soins. Le site «officiel» du Fis-dissous, celui-là même qui avait annoncé sa sortie du territoire national avec l'aide des services du Palais d'El-Mouradia, indique que «cheikh Abassi Madani sera l'invité de l'émission Bila Houdoud d'Al-Jazira le 12 novembre prochain» Des sources concordantes indiquent que le numéro 1 de l'ex-FIS profiterait de cette première grande sortie médiatique, après quelques entretiens accordés par-ci, par-là et pour divulguer les grandes lignes de son plan portant concorde nationale, un plan, croit-on savoir, dans lequel le président Bouteflika et l'émir du GSPC, joueraient un rôle primordial. Le chef des redresseurs et chef de la diplomatie algérienne, Abdelaziz Belkhadem, confirmait ce samedi qu'il ne «resterait pas une heure de plus au sein de la coalition gouvernementale si celle-ci renonçait à sa ligne réconciliatrice». La question qui se pose, donc, est de savoir de quelle réconciliation on parle. Beaucoup d'encre et de salive ont coulé à ce sujet depuis que Bouteflika a été lâché par le FLN et le MSP et qu'il a compris que sa seule chance de briguer un second mandat était de jouer la carte islamiste, plus précisément celle de ce qui reste de l'électorat de l'ex-FIS. Pour ce faire, de nouvelles concessions, dont on ignore la nature, sont nécessaires. Il est à peu près certain, indiquent des sources proches de la mouvance islamiste, que «nous en saurons beaucoup plus après le passage de Abassi Madani sur cette chaîne très suivie dans le monde arabe, et qui a vu défiler des noms algériens importants tels que Hocine Aït-Ahmed, Ahmed Ben Bella...». On parle d'un autre appel que lancerait Bouteflika aux éléments du GSPC, qui constituent actuellement le seul groupe dangereux, structuré et fidèle au FIS-dissous, en vue de déposer les armes contre de nouvelles concessions, politiques celles-là. Des sources indiquent, en effet, que ni Bouteflika ni les irréductibles de l'ex-FIS n'ont grand-chose à perdre. On nous signale que «l'AIS, qui a déposé les armes et accepté la dissolution du plus important groupe terroriste du pays, n'a obtenu aucune des concessions prévues dans l'accord initial, conclu en octobre 97». Seuls des avantages sociaux ont été accordés à de nombreux «trévistes», ce qui n'a pas été du goût de l'aile dure et pure de l'ex-FIS. Bouteflika, qui ne pouvait aller plus loin à cette époque, peut fort bien envisager de franchir «cette ligne rouge» qui consiste à réhabiliter le FIS lors du prochain mandat présidentiel. Ce serait, en somme, le seul moyen de s'allier également le soutien de Benhadj, à qui est restée fidèle ce qu'il reste de la base du parti, mais aussi la direction basée à l'étranger, sous la conduite de Mourad Dehina. Dès les premiers jours de la sortie de Abassi Madani du territoire national, il était devenu évident que cet homme était en mission politique d'une extrême importance, n'ayant rien à voir avec les raisons de soins avancées, et qui auraient parfaitement pu être prodigués dans des pays autrement mieux équipés que la Malaisie. En témoignent les nombreuses sorties médiatiques qu'a faites Abassi Madani et qui ont, notamment, servi à dévoiler qu'il prépare une initiative de «paix» en direction des autorités et des groupes armés encore en activité. En dépit de l'interdiction dont Abassi Madani est frappé, Zerhouni s'est montré «indulgent» à ce sujet, ce qui peut vouloir dire que le clan présidentiel soutiendrait ce genre de sortie. La première d'entre elle, est-il besoin de le rappeler, a été assimilée à un véritable «discours à la nation» digne d'un chef d'Etat. Nul doute que tous les Algériens, mais aussi la plupart des chancelleries auront les yeux rivés sur cette chaîne arabe, mercredi prochain, pour en savoir plus sur l'initiative que se propose de rendre publique le numéro un de l'ex-FIS. Il est des indices qui ne trompent pas, de même que rien de fortuit n'advient en politique.