C'est à Bordeaux, en 1870, que Si Ahmed Tidjani, chef de la confrérie de la tidjania, fait la connaissance d'Aurélie Picard, une jeune modiste dont il tombe désespérément amoureux. Il demande aussitôt sa main à son père. Ce dernier la lui accorde mais, à une seule condition. Répudier ses trois autres épouses. Si Ahmed Tidjani accepte et couvre sa dulcinée de bijoux. Ambitieuse, Aurélie Picard est conquise. De simple dame de compagnie, elle voit son statut changer du jour au lendemain. Le couple regagne Alger via Marseille à bord du nouveau paquebot-poste, Le Duc d'Aumale. Ahmed est musulman, Aurélie est catholique française. Leur union se heurte à une montagne d'obstacles. En attendant, Ahmed Tidjani installe sa muse dans une villa à Saint-Eugène (Alger) et lui offre un beau cheval appelé “El Ghazel”. Finalement, le mariage du couple est célébré par le Cardinal Lavigerie et béni par le moufti Boukandoura. Nous sommes en 1871. Aurélie Picard a tout juste 22 ans et la grande aventure du Sud démarre pour elle. C'est à quelques kilomètres de Laghouat, à Aïn Madhi, sous un pistachier, que la Lorraine fera construire une somptueuse demeure : le palais de Kourdane (déformation de cour des dames). C'est là que vivra Lalla Tidjania, apprenant l'arabe et adoptant les coutumes du terroir. L'ex-modiste fait bâtir des écoles et des dispensaires où sont soignés les pauvres. Seul bémol, Lala Tidjania n'aura jamais d'enfants. Elle rendra l'âme en août 1933, à 84 ans, à Kourdane, où elle repose, désormais, au pied du Djebel Amour qu'elle a tant aimé ! Nadia Arezki [email protected]