Le Syndicat algérien de l'industrie pharmaceutique (SAIP) estime que de nombreuses anomalies freinent l'émergence d'une industrie pharmaceutique en Algérie. Le Syndicat algérien de l'industrie pharmaceutique (SAIP) accueille avec satisfaction la nomination du Dr Djamel Ould-Abbès à la tête du département de la Santé. Le SAIP voit en ce ministre l'“homme qui pourrait redresser la situation du secteur”. La conjoncture est, selon les membres de cette organisation syndicale, “favorable”, d'autant plus que le programme du gouvernement intègre en son sein la production nationale comme une priorité. Or, la réalité que révèle le terrain est tout autre. “Il n'y a pas eu amélioration de la situation quand bien même le Premier ministre avait d'ores et déjà tracé la voie à suivre pour l'émergence d'une industrie pharmaceutique digne de ce nom en Algérie”, constate, non sans regret, le Dr Abdelkrim Djebbar, président du SAIP. Le premier dirigeant de ce syndicat évoque les diverses difficultés auxquelles font face les producteurs algériens dans l'exercice de leur activité. “Nous observons toujours des ilots de résistance voulus ou non, volontaires ou involontaires. Nous ne savons plus”, déplore-t-il. La problématique de l'enregistrement, avoue le Dr Djebbar, est l'un de ces nœuds de résistance. Quand la loi a été promulguée par le ministère de la Santé, à travers le décret exécutif n°92-284 du 6 juillet 1992, relatif à l'enregistrement des produits pharmaceutiques, l'article 22 stipule : “Le ministre se prononce dans un délai de 120 jours à compter de la date du dépôt du dossier scientifique et technique. Dans les cas exceptionnels, ce délai peut être prolongé pour une période de 90 jours, notification en est fait au demandeur avant l'expiration dudit délai. Ce délai est suspendu lorsqu'une expertise est ordonnée ou qu'il est demandé à l'intéressé de compléter son dossier ou de fournir des explications oralement ou par écrit”. Mais force est de constater que les responsables concernés ne tiennent pas compte de cette disposition. Des dossiers de médicaments issus de la production nationale attendent depuis 6 mois, une année voire deux ans, avant d'être enregistrés aux services compétents au ministère de tutelle. Parfois, pour une simple extension de volume ou de forme, cela prend un délai inacceptable. Pis, souvent, aucune suite n'est donnée à cette demande. “Cette irrégularité constitue un frein à la production nationale et va à contresens des directives du Premier ministre Ahmed Ouyahia”, souligne le Dr Djebbar. L'autre contrainte soulevée par le président du SAIP a trait à la liste des produits interdits à l'importation, établie par le ministère de la Santé. Cette mesure n'a pas été suivie dans sa totalité puisque certains produits ont échappé au contrôle, ciblant ainsi directement les producteurs locaux. Cette liste vieille de 2 ans n'a pas été réactualisée. Pourtant, le SAIP l'a signalé à plusieurs reprises, sachant que de nouveaux produits génériques sont fabriqués dans notre pays depuis l'établissement de cette première liste. Des investissements ont été ainsi consentis par les fabricants nationaux pour des aménagements d'ateliers, achats d'équipements, création d'emplois, transfert de technologie… Cependant, aujourd'hui, ces produits pharmaceutiques, fraîchement fabriqués, se retrouvent, au grand dam de ces investisseurs, sans protection comme attendu par le Premier ministre dans sa directive. Une autre anomalie a également suscité la réaction des producteurs nationaux, affiliés à cette organisation. Il s'agit du programme d'importation des matières premières, des excipients, des équipements et les articles de conditionnement… “De nos jours, depuis mars dernier, on nous parle d'une commission de programmes qui a la prérogative d'étudier et d'évaluer le prix des matières premières à importer. De par le passé, le ministère de la Santé négociait en revanche le prix du produit fini et non celui des matières premières”, affirme le Dr Djebbar, qui soutient mordicus que la création de cette commission n'a aucune base juridique. Les programmes d'importation sont donc remis à qui de droit mais les réponses tardent à venir. “Patientez. Vos dossiers sont à l'étude au sein de la commission”, est la seule réponse valable reçue par les producteurs. Ce qui cause une rupture de stocks de médicaments, conséquence d'un retard flagrant dans la production. “L'ensemble de ces écueils perturbent les fabricants dans l'exercice de leur métier. Et des observateurs indélicats ne ratent pas l'occasion pour les qualifier de fabricants incapables qui n'ont pas les moyens de leur politique”, reproche le patron du laboratoire pharmaceutique Lad Pharma. “Nous faisons face à une nouvelle forme de bureaucratie qui bloque l'élan positif entamé par la production nationale”, ajoute-t-il. Par ailleurs le SAIP, tient à préciser le Dr Djebbar, s'inscrit en droite ligne de la stratégie mise en place par l'Exécutif en matière de médicament. Les producteurs nationaux sont, selon lui, déterminés à relever le défi et atteindre une couverture de 70% à 80% des besoins du pays, tel que prononcé par le le Dr Ould-Abbès dans une récente déclaration. Toutefois, il serait judicieux, suggère-t-il, d'instaurer un dialogue permanent entre les pouvoirs publics et les opérateurs afin que tous les acteurs du marché travaillent pour un seul objectif : la naissance d'une industrie pharmaceutique. Ceci passe par une réponse positive à la proposition du SAIP, liée à la mise en place d'un couloir vert au profit des producteurs. Le syndicat demande à ce que les dossiers d'enregistrement des fabricants soient traités de façon séparée de ceux des importateurs au sein de la sous-direction chargée de cette activité au ministère. Pour le programme d'importation des matières premières, excipients… le SAIP propose aussi la désignation d'une personne qui prendra en charge les dossiers des producteurs et facilitera leur signature.