Une véritable tornade s'est abattue sur les marchés financiers internationaux et sur les marchés des matières premières durant le mois de mai 2010 ; le prix du baril qui valait 87,25 $ le 3 mai se négociait à 66,25 $ le 26 mai (une baisse de 23%). Les grands indices boursiers internationaux tels que le Dow Jones, le Nikkei 225, le FTSE 100, le Dax ou le CAC 40 perdaient en moyenne 14% pour cette même période. Quant à la parité euro/dollar, l'euro a subi une perte de l'ordre de 12% face au dollar. Les médias financiers internationaux sont presque tous unanimes sur la cause de l'effondrement des marchés financiers internationaux en évoquant comme motif la crise budgétaire européenne et plus particulièrement celle qui sévit dans les pays portant l'acronyme PIIGS (Portugal, Irlande, Italie, Grèce, Espagne). Mais cette thèse défendue par les médias serait-elle crédible ? la culture de la Bourse et des marchés financiers me permet d'être critique à l'égard des arguments des médias financiers internationaux et je tiens à présenter mes contre-arguments sous forme de trois questions. 1 - ma première question est d'ordre académique et concerne l'efficience des marchés financiers, le problème de la dette souveraine des pays du PIIGS avec toute sa littérature économique et ses composantes financières telles que le ratio dette/Pib, le rapport du déficit budgétaire sur le PIB, etc. Toutes ces informations étaient déjà connues par les acteurs des marchés depuis 2007. Ma question est la suivante : comment se fait-il que les marchés financiers européens et internationaux avaient omis d'intégrer des informations d'une telle importance dans leur cours ? Rappelant que les marchés financiers d'aujourd'hui sont puissamment efficients. 2 - Ma seconde question concerne la cyclicité de la conjoncture économique mondiale. comment se fait-il qu'une crise (la crise budgétaire des PIIGS) surgisse à un moment où l'on vient de sortir d'une autre crise (la crise financière mondiale de 2008) et que la reprise économique mondiale, et plus particulièrement américaine, n'est plus une question de spéculation ou d'anticipation, mais d'un fait réel, la performance affichée des indicateurs macroéconomiques américains, asiatiques et même européens de ces derniers mois le prouvent. un groupe d'économistes, conduit par monsieur Nouriel Roubini, évoque le scénario ou la théorie du double Deep. certes, cela est possible quoique ce soit improbable ; l'économie mondiale d'aujourd'hui n'est pas celle des années 1930, la globalisation des marchés financiers internationaux et l'interdépendance des économies des grands pays de ce monde montrent bien la limite de cette théorie. À titre d'exemple, l'économie américaine, qui est la locomotive de l'économie mondiale, influence d'une manière directe les autres économies, et ce n'est pas l'économie d'un petit pays comme la Grèce ou l'Espagne qui fera l'inverse. 3 - Ma troisième question concerne le niveau des taux d'intérêt aux USA et en Europe. Presque dans toutes les crises financières à caractère monétaire ou budgétaire qui se sont produites dans le passé, les taux d'intérêt ont toujours joué un rôle déterminant. Les crises monétaires ou budgétaires s'aggravent dramatiquement lorsque les taux d'intérêt se propulsent fortement vers le haut, cela se produit sous l'impulsion d'une manœuvre des grands spéculateurs ou par les interventions des banques centrales, la crise asiatique de 1997-1998 et la crise monétaire européenne de 1992 sont des exemples qui illustrent bien la logique de ce raisonnement. Mais dans cette crise budgétaire actuelle des PIIGS, on constate que la courbe des taux est et demeure plate et aucun mouvement alternatif n'est à signaler hormis quelques fluctuations insignifiantes. ceci est une conséquence du niveau bas des taux d'intérêt et de l'abondance des liquidités chez la BCE (Banque centrale européenne). Un exemple, la Grèce a vu la notation de sa dette sévèrement dégradée de plusieurs crans par les trois agences de notation financière et son papier obligataire était passé sous l'étiquette Junk Bonds (obligation pourrie), mais malgré cela, le coupon de l'obligation de l'état grec ne dépasse pas les 6%. Le rôle neutre et l'impact neutralisé des taux d'intérêt donnent une bonne indication sur l'état de cette crise et qui n'est, en fin de compte, pas aussi dramatique que l'imagine la presse financière internationale. En conclusion, je dirais que cette petite crise n'est autre qu'un prétexte inventé par les grands de la finance internationale en mascopie avec les médias financiers, les agences de notation financières, les experts financiers, etc. Le but unique de cette manœuvre est de faire baisser les cours des marchés financiers et ceux des matières premières en incitant (en effrayant) les petits et moyens investisseurs qui ont réalisé de grands profits durant la période de mars 2009-avril 2010 sur les marchés cités à vendre leurs actifs afin de laisser les grands de la finance seuls sur le marché pour une future hausse des cours dont ils seront les grands bénéficiaires. N.L. Analyste boursier à la banque d'affaires suédoise Hagströmers och Qviberg