Alliance Assurances lance, dès le 2 novembre, une souscription pour lever 1,4 milliard de dinars en émettant 1 804 000 actions au prix de 830 DA l'action. Son P-DG a sillonné le pays à la rencontre des opérateurs économiques, des banquiers et des souscripteurs. M. Hassan Khelifati, P-DG de la compagnie, en parle comme d'“un événement historique, une première pour le marché”. Il évoque dans cet entretien les projets de la société. L'opération, saluée par les acteurs financiers de la place, focalise toute l'attention des opérateurs économiques nationaux. Liberté : Vous avez effectué une campagne d'explication pour convaincre les opérateurs économiques et les banquiers de souscrire à l'opération d'introduction de votre compagnie d'assurances à la Bourse d'Alger, pourriez-vous nous faire un bilan de cette campagne ? ll Hassan Khelifati : Effectivement, dans le cadre de notre programme de road show, nous avons visité 15 villes, qui représentent pratiquement 15 régions. Nous avons été à Oran, Sidi bel-Abbès et Tlemcen dans la région ouest. Nous avons fait trois villes du sud, Ghardaïa, Biskra et El-Oued. Nous avons visité Blida, Chlef et Tizi Ouzou au centre du pays. Et nous avons rencontré les opérateurs et banquiers à Béjaïa, Constantine, Sétif et Annaba, à l'est du pays. C'est un signal positif, du moment que nous avons pu mobiliser beaucoup de chefs d'entreprise de référence et aussi beaucoup de banquiers. Ces rencontres nous ont permis de clarifier plusieurs points, d'expliquer l'opération, de faire œuvre de pédagogie. Parce que au-delà de l'action d'alliance assurances, beaucoup de chefs d'entreprise étaient intéressés par l'opération en Bourse en elle-même. Ils ont compris l'intérêt d'une telle opération pour leur propre projet, afin de se donner une envergure nationale, se développer, sortir de cette relation banque-entreprise, qui a ses limites, et chercher d'autres sources de financement, d'autres possibilités de renforcer leurs fonds propres et sortir de l'engrenage de l'endettement. Les banquiers, les chefs d'agence et les directeurs régionaux rencontrés étaient très enthousiastes pour réussir l'opération. C'est l'enseignement majeur de cette tournée. Ils ont mobilisé toute leur clientèle potentielle. Nous avons l'impression, lors des derniers road show, que le marché s'est approprié l'opération. Beaucoup de nos invités nous ont promis de souscrire à l'opération d'augmentation du capital de notre compagnie via la Bourse d'Alger. Quel a été le message que vous avez véhiculé pour convaincre les potentiels souscripteurs ? ll C'est d'abord une opération historique, une première. Puis nous voulons partager les fruits de notre développement. Nous voulons aussi, à notre façon, contribuer à la relance du marché financier, donner la possibilité aux algériens d'avoir des produits de placement et financiers, plus intéressants que les bons de Trésor et les dépôts à terme. Les dépôts à terme rapportent aujourd'hui 2 à 3%, alors que l'inflation est à presque 6%. Donc, vous perdez de l'argent en réalité. Nous, nous offrons un produit intéressant sur le plan du rendement, sur le plan valorisation des investissements des particuliers et des entreprises. Mais notre message le plus important, c'est que nous avons le devoir de rétablir la confiance entre les algériens et dans l'entreprise algérienne. Nous ne devons pas décevoir le marché. L'entreprise algérienne privée est capable de travailler dans la transparence pour améliorer ses résultats. Au-delà de l'augmentation du capital visé par cet appel public à l'épargne, Alliance assurances prévoit-elle de développer d'autres projets ? ll Effectivement, sur la notice détaillée, visée par la Cosob, disponible sur le réseau bancaire et sur le site internet dédié à l'opération, nous avons un plan de développement en plusieurs phases. La première, c'est d'abord de renforcer la maison-mère, Alliance dommage, en ressources humaines, en termes de couverture de réseau, de produit et de système d'information. Par la suite, la compagnie a élaboré un plan de développement conséquent, pour assurer une bonne et juste rentabilité aux investisseurs. Les projets sont au stade de maturation. Nous prévoyons de lancer une joint-venture assurance des personnes avec un partenaire européen. Cette société fournira une offre diversifiée en matière de produits de santé et maladie, qui n'est pas très développée en Algérie. Elle développera, dans le futur, les autres produits de prévoyance, de retraites et d'épargne. Ces produits, nous allons prendre le temps de les préparer, parce que le marché financier aujourd'hui n'est pas très développé. Alliance assurances a décidé également d'investir dans la promotion immobilière. Vous savez, de par le monde, l'immobilier est au cœur du métier des compagnies d'assurances. C'est donc en toute logique que nous avons décidé de nous lancer dans la gestion d'actifs immobiliers et dans la promotion immobilière. Ce n'est pas une société de promotion immobilière classique. Nous voulons développer des projets pour alimenter le marché locatif, pour gérer des ensembles immobiliers et constituer une banque foncière pour la compagnie. Enfin, Alliance Assurances procédera à la création d'une société de capital risque, dont l'objectif est de soutenir des projets dans le secteur de la santé, des projets de cliniques, d'imagerie médicale, de laboratoires d'analyses, de projets de société d'assistance. En synergie totale avec les assurances des personnes et des produits maladies et santé, nous prévoyons d'intégrer le fonds d'investissement dans ce cadre. Justement, en évoquant le Fonds d'investissement, le Conseil national de l'investissement vient de donner son accord ? ll Nous attendons la notification officielle. Ce dossier a été introduit en même temps que le dossier de la Bourse. Nous avons décidé de maintenir les deux options. Nous avons confiance dans la réaction du marché. L'intégration du Fonds d'investissement va ramener un plus. Nous voulons un partenaire de la taille et de la qualité de ce fonds pour nous apporter le soutien managérial dont nous avons besoin pour nous développer. Ce partenariat va donner plus d'assurance aux nouveaux actionnaires de la compagnie. Le taux d'intégration du Fonds d'investissement ne saurait dépasser 20% du capital. Nous attendons de ce fonds un soutien managérial, un savoir-faire et un soutien technique dans l'activité future, étant donné qu'il développe beaucoup d'activités dans le monde. À travers vos différents contacts avec les autorités publiques et les institutions, est-ce que vous avez relevé la volonté du gouvernement de développer le marché financier ? ll La volonté des pouvoirs publics est visible. Ils ont pris la décision, dans la loi de finances complémentaire 2009, d'exonérer les dividendes et les plus-values des actions en Bourse pendant cinq ans. Par ailleurs, nous avons discuté avec les responsables au niveau du ministère des finances, de la Cosob et avec les banquiers ; nous avons relevé la volonté d'aller de l'avant. La Cosob est en train de préparer un certain nombre de textes à soumettre au gouvernement pour permettre l'ouverture vers la petite et moyenne entreprise. Nous avons senti cette volonté de relancer le marché financier. Ce qui nous a encouragés aussi, c'est la volonté des banquiers, notamment les chefs d'agence et les chefs de trésorerie, qui nous ont dit : “allez-y, nous voulons réussir cette opération.” Nous sommes convaincus que nous allons réussir. Cette opération doit ouvrir la porte à d'autres, et constituer peut-être un vrai départ au marché financier algérien. Vous savez la Bourse marocaine et la Bourse tunisienne ont réussi, cet été, une double introduction pour un concessionnaire automobile, à la bourse de Casablanca et à la Bourse de Tunis. C'était une réussite totale, au Maroc la demande a représenté 9 fois l'offre et à Tunis 16 fois l'offre. Jeudi passé, il y a eu une annonce extraordinaire, une compagnie d'assurance marocaine Cnia Saâda veut lever 80 millions d'euros, sur la Bourse des Valeurs de Casablanca, soit six fois notre offre, en 3 jours. Elle ouvre les souscriptions le 2 novembre et les clôture le 5 novembre, avec la possibilité de clôturer le 3 novembre. Un marché financier qui fonctionne constitue un formidable levier de croissance. Vous êtes donc optimiste… ll Je suis très optimiste, et pas seulement pour Alliance assurances. Je suis optimiste sur le fait que cette opération va démystifier la Bourse et donner le signal aux autres entreprises, notamment privées. Nous, les entreprises privées et les grands groupes en général, avons cette responsabilité historique d'aller de l'avant et de créer cette dynamique.