Incontestablement, le plus ancien tombeau royal berbère, mais aussi et surtout considéré par les spécialistes (historiens, archéologues et autres) comme étant la première tentative pour l'édification d'un Etat en Afrique du Nord ; il est là depuis 25 siècles. Le tombeau berbère Imedghassen (IIIe siècle av. J.-C.) semble être condamné à ne jamais connaître le repos et la quiétude et surtout la prise en charge et la restauration mille fois promise et mille fois abandonnée et niée. Le tombeau a une forme typiquement berbère à degrés, c'est-à-dire une construction de forme cylindrique, surmontée d'un cône formé de gradins, il fait 59 m de diamètre et 18,50 m de hauteur, ce qui le distingue énormément de Bazinas, qu'on rencontre en Afrique du Nord, et qui ne dépasse pas un mètre de hauteur. Habillé d'un décor sobre qui rappelle la civilisation carthaginoise : 60 colonnes doriques surmontée d'une corniche dont la gorge est typiquement égyptienne. Une plate-forme au sommet supportait peut-être une sculpture : un lion, un chariot, un cavalier, souvent utilisé comme symbole dans la civilisation amazighe. Le côté est, un dallage forme un avant-corps, en partie revêtu d'un enduit pourpre. Selon les spécialistes, il ne peut s'agir que d'un lieu de culte. L'analyse de l'architecture du monument et les datations au radiocarbone, effectuées il y a une trentaine d'années par des spécialistes allemands, ont permis de faire remonter sa construction au début du IIIe siècle av. J.-C. Imedghassen n'a pu être que la sépulture d'un puissant monarque, selon le spécialiste de la préhistoire Gabriel Camps. Le repère chronologique de la situation du mausolée dans l'air de la mouvance de la dynastie amazighe des Massyles permet d'identifier le tombeau et le nom Imedghassen comme étant un ancêtre du roi Massinissa. Cette importance historique et identitaire n'a pas échappé au mouvement associatif local et national qui a su utiliser le Net comme moyen d'information et de communication, pour alerter les organismes et les associations mondialement connus et qui se sont mis de la partie, à l'exemple de la prestigieuse fondation mondialement connue World Monument Watch (WMW) qui, dans un des ses rapports, n'a pas hésité à qualifier l'état du tombeau Imedghassen de déplorable, en le classant, avec le tombeau de Massinissa (soumaâ khroub) parmi les 100 sites les plus menacés dans le monde. Le président de la fondation, Dr Gaetano Plumbo, avait souligné que son organisme WMW avait versé beaucoup d'argent pour l'entretien et la restauration des deux monuments (Imedghassen et le tombeau de Masinissa (soumaâ) lors d'une visite aux deux monuments, il y a de cela plus de 8 ans. Octobre 2010, sur les lieux à Imedghassen, il n'y pas âme qui vive, les travaux sont abandonnés.Mais le plus dramatique, c'est de constater que le tombeau est éventré au sommet, alors qu'initialement les travaux avaient pour objectif la protection du site. Historiquement et chronologiquement, le site a connu d'autres débâcles et d'autres mascarades, plus précisément dans les années 1970. Des colonnes doriques à la base du tombeau ont été purement et simplement bétonné et de nos jours, la cicatrice et encore visible, heureusement qu'une décision a été prise d'arrêter immédiatement les travaux. Interrogés sur les causes de ces ratages, aussi bien les responsables du secteur que les scientifiques ne sont pas bavards, le sujet Imedghassen devient une hantise. Aux dernières nouvelles, la direction de l'urbanisme et de la construction (DUC) de Batna a été dessaisie du dossier, remis une autre fois à la direction de la culture. Le nouveau directeur de la culture, fraîchement installé, n'a pas les détails du dossier Imedghassen. Un lourd dossier ! Seuls les membres du mouvement associatif ont bien voulu prendre la parole, sans peur ni obligation ; car, selon eux, si les Algériens ne défendent pas leur patrimoine et leur identité qui va le faire à leur place ? Le président de l'association du même nom Imedghassen nous dit à ce sujet : “Le tombeau Imedghassen est, certes, un site archéologique d'une grande importance historique, un patrimoine universel, mais avant tout, c'est notre ancêtre. Ce n'est pas un jeu de Lego où en toute impunité des apprentis de l'archéologie et de la restauration viennent s'entraîner.”