La remarquable foule drainée par le Salon du bijou traditionnel, organisé dernièrement par la Chambre de l'artisanat de la wilaya de Tamanrasset, n'a pas suffi aux yeux des artisans qui éprouvent de sérieuses difficultés à écouler leurs produits. En effet, ils connaissent une période de vache maigre qui les affecte énormément en l'absence d'une véritable politique de production. “L'Etat nous a accordé plusieurs avantages pour améliorer essentiellement la compétitivité de nos produits et du coup préserver notre patrimoine culturel et les symboles de nos mythes ancestraux gravé en reliefs fascinants sur les bijoux. Mais l'inexistence d'un système de production rassemblant en entité les artisans du même territoire et qui partagent la même activité constitue un frein à tout le secteur, particulièrement en ce qui concerne le bijou traditionnel qui nécessite une coopération et une homogénéité impérative entre les artisans pour faire face aux multiples défis”, s'accordent à dire quelques artisans rencontrés à l'occasion à la maison de l'Artisanat. Et d'ajouter : “Des moyens non moins importants sont déployés par notre Etat pour booster le secteur de l'artisanat. On ne rencontre plus de problèmes pour créer sa propre entreprise soit par l'Ansej ou par le crédit accordé par l'Angem. Cependant, la réalité qu'il ne faut surtout pas omettre est que les artisans de Tamanrasset, en particulier, sont à la merci des touristes. Nos produits sont fort bien vendus aux touristes qui veulent généralement en faire cadeau à leurs proches ou encore les garder comme souvenir de notre pays. C'est dire que grâce aux rentes réalisées que nous nous permettons de couvrir nos frais et charges. Ce qui n'est pas réalisé cette année avec la baisse vertigineuse du taux de touristes et l'indifférence des autorités. On a reçu un coup dur et paralysant.” Amriwad Abdellah, artisan interrogé à cet effet, est du même avis. Il a eu ses balbutiements à l'âge de 15 ans et s'est forgé dans la fabrication de bijoux traditionnels aux motifs propres à la région. Créer sa propre entreprise en 2006, baptisée au nom de l'homme bleu, lui a permis de faire preuve de ses compétences irréprochables et participer aux différents concours et compétitions nationaux de bijoux traditionnels. Son rêve est devenu réalité après avoir remporté le 3e prix au concours organisé en novembre dernier à Alger. “J'ai participé avec une parure et une ceinture en argent que j'ai fabriquées sous forme de la célèbre clef de la capitale d'Ahaggar et sur lesquelles sont gravés des motifs on ne peut mieux envoûtants. Je me suis investi corps et âme pour les réaliser. Et cela s'est transformé en joie indescriptible en gagnant un prix décerné par des jurys satisfaits et devant une assistance subjuguée”, a-t-il dit. Un ravissement qui s'est vite dissipé pour laisser place au désespoir en évoquant les problèmes rencontrés par son entreprise, notamment tout ce qui a trait au matériel de production et à la matière première. “Le matériel utilisé par les artisans n'est pas disponible à Tamanrasset. Il faut se taper 2 000 km pour l'avoir, car le transport aérien nous revient beaucoup plus cher. Le même scénario pour l'acquisition de la matière première et les autres perles accessoires. Tamanrasset est à l'autre bout de l'Algérie. La distance freine nos activités et par malheur aucune initiative n'est prise par les autorités concernées dans ce cadre ne serait-ce que pour financer nos voyages pour participer aux manifestations ou aux expositions nationales, histoire de consolider le système de production locale en tissant des relations dans le but d'exécuter collectivement certains projets. Mes déplacements et les concours auxquels j'ai pris part m'ont coûté une fortune. C'est bien de noter qu'un aller-retour par avion à destination d'Alger est à 28 311 da. C'est un chiffre d'affaires mensuel. Il faut donc être armé d'une bonne volonté et avoir le sens du sacrifice pour participer à une exposition au nord du pays. Sinon, on agonisera en silence.”