Hier matin, Tizi Ouzou s'est réveillée sous le choc et la psychose car la soirée de samedi a été des plus chaudes notamment au centre-ville et dans les quartiers sensibles des Genêts, du Mondial, du Cadi et de M'douha. Mais, curieusement, au lendemain d'une nuit mouvementée où plusieurs artères principales de la ville avaient été barricadées au moyen de gravats de toutes sortes et de pneus brûlés alors que de nombreux édifices publics avaient été attaqués et sérieusement endommagés, la ville de Tizi Ouzou donnait la nette impression d'une cité plutôt calme et paisible surtout qu'elle a été nettoyée de tout le “bazar” engendré la veille par un véritable ouragan qui a tout balayé sur son passage. Rompue à ce genre de situation du fait que les évènements du Printemps noir sont encore présents dans la mémoire et la douleur, la ville des Genêts s'est donc réveillée dans la désolation et le désarroi, et ce, en secouant péniblement ses haillons au lendemain d'une révolte des plus violentes. Mais si les travailleurs communaux et les services de sécurité et de la Protection civile ont travaillé d'arrache pied durant toute la nuit pour nettoyer la ville de son décor hideux et remettre ainsi de l'ordre dans une cité défaite et remuée dans tous les sens, des traces de saccage et de vandalisme étaient largement perceptibles encore hier matin, notamment sur l'avenue principale Abane-Ramdane où les agences bancaires de la BNA et de la Cnep, celles de la Cnas, de Sonelgaz et d'Air Algérie avaient été particulièrement ciblées par les émeutiers. De bon matin, les kiosques à journaux ont été littéralement pris d'assaut par les citoyens en quête d'information surtout que la veille, la distribution de la presse avait été sérieusement perturbée par le blocage des routes sur l'axe routier Alger-Tizi Ouzou. C'est ainsi que l'on apprendra que d'autres émeutes sporadiques avaient eu lieu la veille dans quelques localités telles que Draâ Ben-Khedda, Boghni, Draâ El-Mizan et Aïn El-Hammam mais de nombreuses autres localités n'ont guère suivi le mouvement de protestation. C'est ainsi que l'activité socioéconomique a plus ou moins repris son cours en début de matinée même si les nombreux travailleurs n'ont pu regagner leur lieu de travail, certains par crainte des évènements, d'autres par prétexte d'absentéisme. Ici et là, les commentaires allaient bon train aux quatre coins de la ville durant toute la matinée et les avis des uns et des autres étaient largement partagés entre ceux qui légitimaient cette révolte due à la grave dégradation du pouvoir d'achat et ceux, fort nombreux, qui regrettaient et condamnaient fermement les actes de pillage orchestrés par des intrus qui ont profité de la confusion pour casser et voler divers mobiliers et autres appareils électroniques. Ce vent de folie et de panique a fait que de nombreux commerçants et investisseurs privés ont dû faire la garde durant ces dernières nuits pour veiller sur leurs biens et protéger légitimement leur commerces notamment à Tizi Ouzou, chef-lieu de wilaya, où quelques émeutes ont été enregistrées hier en fin d'après-midi aux abords du commissariat du centre-ville, ce qui a contraint de nombreux commerçants à baisser hâtivement leurs rideaux pour éviter d'autres dégâts. Enfin, il est à noter que la plupart des établissements scolaires ont fonctionné normalement mais que les cours n'ont pas eu lieu à l'université Mouloud-Mammeri où les étudiants ont tenu de nombreux sit-in de protestation.