Il était une fois un homme très riche. Aussi riche qu'avare. Il était sans doute l'homme le plus aisé de son patelin. Tout comme il était, également, l'homme le plus grippe-sou. Ce qui, d'ailleurs, lui valut le surnom de M'bibizo, qui voulait dire homme avare. M'bibizo était tellement avare qu'il n'avait ni compagne ni commis. Il s'efforçait d'exécuter lui-même tous les travaux et tâches domestiques. Le seul fait de ne rien dépenser suffisait à son bonheur. Et il en était même très fier. Un jour, alors qu'il entretenait son puits, il perdit l'équilibre et se retrouva les deux pattes en l'air et la tête enfouie sous l'eau. M'bibizo se retrouva au fin fond du puits et ne put retenir un perçant appel au secours. - “Au secours ! Au secours !”, bramait-il tant bien que mal. Aussitôt entendu, son voisin se précipita pour lui tendre la main en lui demandant : - “M'bibizo, donne-moi ta main pour que je te sorte du puits.” M'bibizo, qui ne voulait jamais rien donner, n'avait retenu que le mot “donner”. Ce qu'il maudissait plus que tout au monde. C'est donc, seulement après quelques longues et fatales secondes qu'il consentit à tendre sa main. Mais cet inéluctable temps de réaction lui a coûté la vie. Si seulement son voisin lui avait dit “prends ma main”, il serait peut-être encore de ce monde. Tout le monde dans le paisible village de M'bibizo pense que c'est encore l'avarice qui a frappé. Elle avait fait de ce pauvre homme son esclave avant de lui prendre la vie. NADIA AREZKI [email protected]