Aux yeux de la ministre de la Communication, la mesure de suspension n'est pas sous-tendue par des “arrière-pensées politiques”. Khalida Toumi semble s'être ennuyée depuis ces années passées dans “l'opposition”. À la question du député Boualem Mehnaoui du FLN sur les raisons de la suspension qui a touché six journaux, au mois d'août dernier, le choix du moment et les menaces qui pèsent sur l'avenir de la liberté de la presse, la ministre de la Culture et de la Communication s'est livrée à un véritable exercice de funambulisme où la contradiction le disputait à la démagogie. C'est ainsi qu'aux yeux de Khalida Toumi, la mesure de suspension n'est pas sous-tendue par des “arrière-pensées politiques”. “C'est une opération strictement commerciale qui a un début et une fin”, affirme-t-elle. “Il s'agit en fait, explique-t-elle, et tout le monde le sait, d'une demande faite par les sociétés d'impression à un certain nombre de leurs clients, les plus endettés, de se mettre à jour, en d'autres termes à payer leurs dettes (…)” Arguant qu'aucun des journaux touchés n'a refusé de payer et que les imprimeries ne sont pas sous la tutelle du ministère, Khalida Toumi ajoute plus loin : “(…) Vouloir introduire plus de clarté, vouloir rappeler les devoirs et les exigences financières d'une entreprise de presse à des patrons de presse n'équivaut en rien à une tentative de vouloir réduire l'expression plurielle. Je dirais même bien au contraire !” “Parce qu'il est temps, poursuit-elle encore, en matière de gestion des entreprises de presse, comme du reste des entreprises, qu'un certain nombre d'éléments de base qui font la réussite ou l'échec soient plus clairement perçus. Aucune entreprise de presse ne peut être, ne doit être au-dessus des lois de l'économie.” “Nous avons choisi un système qui est complet et qui, en même temps qu'il donne la liberté d'agir, la liberté de dire, prévoit aussi les limites de l'exercice de toutes ces formes d'activités. Et je ne parle pas bien sûr de limites politiques, parce qu'il n'y en a pas”, justifie-t-elle. “Et pourquoi uniquement six journaux ?”, fait observer le député. Khalida Toumi élude la question et se laisse aller dans une digression qui a fini par mettre à nu la dimension politique de la décision. “(…) La presse a pris en charge des questions, à jouer des rôles qui ne sont pas les siens !”, lâche-t-elle. Elle ne s'est pas empêchée de s'interroger sur le sens à donner au mot opinion. “Diffuser du mensonge est-ce diffuser une opinion ?”, s'interroge-t-elle. La ministre soutient qu'“on ne retournera jamais à la case de départ”. “Jamais, parce que cela n'appartient pas à ma culture, mais aussi parce que les réalités objectives du développement de ce secteur font heureusement que l'on ne peut plus revenir à la case zéro.” “Il y a donc, de ce point de vue, une note que j'aimerais apporter, une note qui rassure, une note qui dit pleinement et objectivement que les intentions du gouvernement n'ont jamais été de bâillonner la presse.” Sur les atteintes à la liberté de la presse et ses conséquences sur les institutions, Khalida Toumi, qui précise au passage ne pas partager l'avis du député, rappelle que le débat sur l'utilité de l'existence d'une presse libre est “tranché”. “Oui, nous avons besoin d'une presse libre”, dit-elle. Toutefois, conclut la ministre, le débat sur la presse reste ouvert. K. K. La Petite Phrase de Madame la Ministre La ministre de la Culture et de la Communication, Khalida Toumi, a laissé, hier, pantois les journalistes de la presse nationale qui l'ont interrogée au sortir de l'hémicycle de l'Assemblée populaire nationale (APN), après la séance des questions orales sur les nombreuses arrestations des journalistes par la police. “Quelles arrestations ?”, a-t-elle interrogé sur un air étonnant. “Les arrestations des journalistes de la presse indépendante par la police”, ont-ils précisé, avant de voir Khalida Toumi répondre sur un ton des plus hautains : “Les arrestations ? En 1994, oui, il y avait des arrestations de journalistes et il fallait intervenir pour les libérer !” “Mon problème est de parler avec des journalistes plus jeunes que mois”, a enchaîné la ministre de la Culture et de la Communication pour expliquer la difficulté pour les journalistes d'aujourd'hui de comprendre les péripéties qu'elle a vécues dans le passé quand elle était dans l'opposition. N. M.