Toutes les activités pénales, prévues hier dans l'ensemble du pays, ont été reportées. Toutes les cours et tous les tribunaux du pays ont été paralysés, hier, suite à la grève déclenchée par les robes noires, et dont le mot d'ordre a reçu un large écho auprès de la corporation. Les audiences ont été reportées et les avocats ont observé des piquets de grève dans les cours et les tribunaux. Visiblement, jamais mouvement de protestation des robes noires n'a été aussi suivi. Ainsi à Alger, toutes les affaires qui devaient être jugées, hier, ont été reportées. Aucune activité n'a eu lieu, y compris les présentations des prévenus ayant réclamé la présence de leurs mandants devant les juges d'instruction. Le bâtonnier national, Me Sellini, a animé un point de presse improvisé au siège du bâtonnat d'Alger. “Nous observons cette journée de protestation conformément à la décision du conseil de l'union (ensemble des bâtonniers) et bien entendu suite aux graves violences qui ont été portées contre nos confrères de Tizi Ouzou”, nous a expliqué Me Sellini qui a considéré, par ailleurs, que “la violence contre les avocats comme un dommage considérable porté aux droits de la défense et à la liberté d'expression”. Il a indiqué, à ce propos, que “l'avocat est protégé par l'immunité lorsqu'il porte la robe”. “Plus grave encore, ajoute le bâtonnier national, les violences sont venues toucher le principe sacro-saint de l'inviolabilité du tribunal. Dans cet espace, seule l'autorité judiciaire est souveraine, tous les autres pouvoirs, y compris la sécurité, doivent s'écarter. C'est une atteinte à la hiérarchie des pouvoirs qui place le judiciaire au-dessus de tout le monde”. Le bâtonnier national espère que ce précédent, depuis l'indépendance, sera aussi le dernier. Par ailleurs, des preuves et les rapports des avocats ayant subi des violences ont été réunis et envoyés au président de la République. À Béjaïa, tous les avocats ont observé la grève et toutes les affaires inscrites dans les différentes juridictions ont été reportées. Par ailleurs, au chef-lieu, un sit-in a été observé à l'intérieur du tribunal. “Encore une fois, le pouvoir vient de dépasser les limites en s'attaquant à la corporation. Nous sommes déterminés à ne pas céder à ce genre de provocation”, déclare Me Djenadi Mohand Saïd, un avocat de la région. À Tizi Ouzou, la protestation a été largement suivie d'autant que c'est en solidarité avec les avocats de cette ville que le mouvement national a été déclenché. Les 7 tribunaux relevant de la cour de Tizi Ouzou ont été paralysés. “Ce n'est pas une journée de solidarité seulement, c'est aussi une action de protestation et de dénonciation des graves dépassements qui ont visé la profession. Nous voulons que le pouvoir et les policiers puissent comprendre que la franchise du tribunal est sacrée”, estime Me Hanoun, un jeune avocat du bâtonnat de Tizi Ouzou. Les membres de la corporation à Oran ont, eux aussi, observé l'action de protestation à 100 %. “Nous sommes aussi touchés par ce qui a été fait à nos collègues de Tizi Ouzou”, déclare le bâtonnier lors d'un rassemblement à la cour d'Oran. Les activités de la cour et des tribunaux de la wilaya de Boumerdès ont été gelées au cours de cette même journée. Aucune audience pénale n'a eu lieu. Les avocats se disent solidaires avec leurs confrères de Tizi Ouzou. À Constantine, aussi, les avocats ont répondu favorablement à l'appel du bâtonnat national. Pour les robes noires de cette wilaya, “les éléments des forces de sécurité n'ont fait, à Tizi Ouzou et ailleurs, qu'obéir à des ordres donnés et que dans ce cas-là, les autorités concernées doivent prendre conscience que l'ère de l'impunité doit prendre fin et qu'on ne peut continuer à porter des coups à ce peuple n'importe où et n'importe quand”. Bien entendu, toutes les affaires enrôlées pour les audiences d'hier à Constantine ont été reportées.