Les mouvements de contestation en Algérie s'expriment en dehors des idéologies et du cadre partisan. C'est, du moins, le point de vue de la sociologue franco-algérienne, Amel Boubekeur, de l'école normale supérieure de Paris. Dans un entretien à l'APS, cette dernière a proposé une grille de lecture, mettant l'accent sur le caractère “non idéologique” des émeutes et la culture politique qui, selon elle, se fait d'une façon “non hiérarchisée”, sans leaders mais avec des revendications palpables. Pour Mme Boubekeur, “ce n'est qu'après les émeutes que les courants politiques ont tenté d'organiser ce mouvement”. La sociologue a, en outre, soutenu que la contestation est l'œuvre de personnes qui n'ont pas connu de socialisation politique partisane au préalable. Dans ce cadre, elle a remarqué l'absence d'une revendication à caractère politique claire chez les contestataires qui, d'après elle, “refusent qu'on leur vende un projet de société”, à travers une Assemblée constituante ou des élections législatives anticipées après la levée de l'état d'urgence. Par ailleurs, la spécialiste du phénomène islamiste a estimé que “les islamistes (algériens) n'ont plus aucune emprise sur la rue et ne peuvent prétendre, à l'heure qu'il est, à embrigader ces mouvements de contestation”. La raison se situerait, selon elle, dans le fait que les islamistes, représentés au Parlement, “sont en panne de solutions”, alors que ceux qui sont en dehors du pouvoir “sont incapables d'élaborer un projet politique pour le changement”. Un autre élément a été avancé par l'interviewée : les jeunes Algériens ne sont pas dans une position de revendiquer des alternatives politiques ou idéologiques, mais ils sont dans une position de “résistance civile”.