Vendredi, la ville de Constantine était en liesse. Une double fête. Celle de l'accession du club de football CSC, en Ligue I, d'une part. D'autre part, la soirée d'ouverture du 9e Festival culturel international de jazz, Dimajazz, avec un spectacle exceptionnel : Cheick Tidiane Seck feat Paco Sery. Cette année, c'est le palais de la culture Malek-Haddad qui accueille l'édition 2011 de ce festival, contrairement aux éditions précédentes qui s'étaient déroulées au Théâtre régional de Constantine. Le choix de délocaliser cet événement est relatif, selon les organisateurs, à une plus grande capacité d'accueil du lieu (plus de 600 places, le TRC : 400), mais également pour organiser le festival off du Dimajazz. Alors que les rues de l'antique Cirta étaient envahies par les supporters du CSC qui défilaient pour exprimer leur joie, de l'autre côté de la ville des groupes de jeunes attendaient patiemment d'accéder à l'intérieur de l'immense bâtisse du Palais de la culture pour assister au concert. Il y avait foule, sans débordement. La salle de spectacles Chanderli se remplissait à vue d'œil. Prenant la parole, le directeur de la culture, Djamel Foughali, et le commissaire général du festival, Zoheir Bouzid, ont souhaité la bienvenue à l'assistance, déclarant que le Dimajazz est devenu le rendez-vous culturel de la ville des Ponts suspendus. Cette année, et pour la première fois, la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, a assisté à la soirée inaugurale. Elle était accompagnée des autorités locales de la wilaya de Constantine. Dans sa brève intervention, elle a rendu hommage à Aziz Djemame et Adel Merrouche, cofondateurs du festival, disparus tragiquement. Elle a annoncé officiellement que Constantine allait être dotée d'une salle de spectacles de 6 000 places. Rythmes africains, sonorités jazz… Les lumières de la salle s'éteignent, ne restent que celles de la scène, feutrées. Cheick Tidiane Seck fait son entrée, sous une salve d'applaudissements. L'organiste malien, qui depuis trente-cinq ans, est de toutes les aventures musicales à travers le monde, côtoyant des artistes de renom : Hank Jones, Ornette Colemant, Salif Keïta, Dee-Dee Bridgwater… Sa touche personnelle, nourrie des vibrations de musiques noires américaines, le rend incontournable. Il est également considéré comme “l'un des plus valeureux musiciens de session et de live de sa génération”. Ses doigts commencent à pianoter une musique d'ambiance. Et un par un, les musiciens entrent sur scène : le grand batteur Paco Sery, Olivier Ajavon à la guitare, Alioune Wade à la basse, Adama Diarra au djembé et Kabiné Kouyaté (fils de l'illustre El- Hadj Sory Kandia Kouyaté, légendaire et voix d'or du mandingue) au chant. “Nous allons vous offrir un parcours complètement dingue” lance d'emblée Cheick Tidiane Seck. Et ils ont tenu leur promesse. Si la soirée a démarré timidement, pour tâter la température, au fil des chansons le rythme monte. L'ambiance est bon enfant, le public est demandeur, applaudissant, criant, se trémoussant. Les artistes réalisent une belle exécution artistique. Un mélange des genres et des musiques : du groove, de la pop, du rock, les musiques ethniques d'Afrique, un assemblage que des sonorités jazz très fluides viennent caresser. Plus qu'un concert, c'était une démonstration de virtuosité. Les musiciens ont mis à nu leur talent. Chacun a eu son intermède, dévoilant son doigté et son génie musical. Ils sont époustouflants. Cheik Tidiane Seck accroche avec son jeu de claviers unique, ou Paco Sery qui s'acharne sur sa caisse, preuve d'un talent inégalé… Le chanteur n'a pas démérité. Un coffre vocal sans pareil, grave et puissant. Il subjuguait de sa voix. Le rythme baissait pour permettre aux présents de mieux rebondir, mieux apprécier la soirée qui se déclinait en découvertes musicales pour le public constantinois et des autres wilayas. C'était également l'occasion pour Cheick Tidiane Seck de rendre hommage à certains artistes qu'il a croisés dont Hank Jones. Fusion et partage Avant la fin du concert, la troupe Dar El-Bahri de Constantine, versée dans la musique gnaouie, fit son entrée jouant sa musique. Elle traverse la salle avant de rejoindre les invités du Dimajazz. Une fois sur scène, c'est un bœuf réussi, improvisé. Les sonorités gnaouies se mélangent au jazz, pop, aux rythmes africains… Une véritable délectation musicale. Un moment de partage, de communion, de transe. Tout s'emballe, s'enflamme, et sur scène et dans la salle. Une soirée célébrant la musique jazz et tous ses dérivés, ainsi que la réussite footballistique du CSC. A. I. Programme d'aujourd'hui À 18h, scène Aziz-Djemame (Off) : le groupe Mazal (world music) de Béjaïa À 20h30 : Hijaz, fusion jazz/oriental (Belgique/Maghreb), Keltic Tales jazz rock/celtic (France)