Défaillance de l'état Comme à l'accoutumée, à quelques jours du mois sacré, les marchés du pays enregistrent une flambée des prix des fruits et légumes, du poulet et de la viande. Tout porte à croire que cette tendance va se poursuivre au cours de la première quinzaine d'août, en dépit d'un système de régulation en rodage et de gros efforts déployés par le ministère de l'Agriculture, la SGP Proda, l'ONAB ainsi que les abattoirs Centre, Est et Ouest. Les pouvoirs publics ont beau annoncer la disponibilité de la viande ovine et du poulet à des prix abordables, grâce à un réseau de points de vente beaucoup plus élargi, il s'agit de vérifier si la distribution de ces produits dans les quartiers à forte concentration de population, sera assurée efficacement, d'autant que “la main invisible” de la spéculation tentera, comme lors des précédents Ramadhan, de saborder l'opération. Par ailleurs, s'il est admis que le comportement du consommateur joue un rôle important dans l'évolution de ces prix, il est indéniable que l'action de l'état constitue un facteur décisif dans cette équation. Or, la volonté de l'état s'exprime avec les moyens mis à la disposition des services de contrôle pour juguler les différentes pratiques spéculatives. Or, le ministère du Commerce ne disposera que de 2 500 agents pour lutter contre ces phénomènes. Ce chiffre n'a pas évolué sensiblement à la hausse depuis une décennie. Un indice dont l'état se lave les mains. En dépit des discours officiels musclés sur ce sujet, récurrents depuis de nombreuses années, le marché intérieur connaît toujours une anarchie avec une prédominance des activités informelles et une inflation d'infractions : manque d'hygiène, absence d'affichage des prix, commercialisation de produits non conformes, fraudes sur le poids, ventes sans factures, non-respect de la chaîne de froid. Autre indice de l'insuffisante maîtrise du marché, l'écart entre les prix de produits de large consommation sur les marchés de gros et ceux des marchés de détail tantôt avoisine, tantôt dépasse les 100%. Par exemple, la salade cédée à 35 DA à Attatba se retrouve à 100 DA dans les marchés de détail de la capitale. En résumé, on a affaire à un système de transactions où plusieurs mains interviennent avant que le produit aboutisse au consommateur à un prix exorbitant. Un topo qui dure depuis des décennies. En fermant les yeux sur ces pratiques et en démontrant son incapacité à maîtriser le marché, l'état contribue, ainsi, à l'érosion du pouvoir d'achat de la majorité de la population. Quant au traitement de l'informel, on continue à provoquer les jeunes commerçants qui exercent leurs activités sans documents. Au lieu d'accélérer la réalisation d'espaces commerciaux de proximité en vue de légaliser le commerce informel. Au final, dix ans d'embellie financière sans précédent dans l'histoire du pays n'ont pas suffi à organiser le marché intérieur, à renforcer les services de contrôle et à multiplier les marchés de gros et de détail à travers le pays. Conséquence d'une si mauvaise volonté de l'état, beaucoup de communes en Algérie ne disposent pas de marché de détail. Les ménages sont finalement livrés en pâture à des spéculateurs, de vils commerçants qui n'ont de commerçants que le nom. Après près de cinquante années d'indépendance, ni les ménages ni les commerçants de manière générale n'ont acquis une culture commerciale qui leur permette pour les uns de bien acheter, de rationaliser leur consommation et, pour les autres, de mieux vendre. On se demande à quoi sert l'unique chaîne de télévision ? En fait, on a peu utilisé le pouvoir de ce média lourd pour sensibiliser les citoyens sur les questions de consommation. Cette situation d'anarchie sur les marchés devient de plus en plus insoutenable. Tôt ou tard, si l'on ne remédie pas à ces dysfonctionnements, on s'acheminera vers la “révolte du couffin”, tant les ménages sont de plus en plus excédés par cette absence de l'état et ce diktat des spéculateurs. K. R. [email protected] LIRE TOUT LE DOSSIER EN CLIQUANT ICI