La rentrée sociale sera chaude pour les familles vivant sous le seuil de la pauvreté. Le mois sacré de Ramadhan a replacé sur le tapis ce dossier et remis en cause les efforts consentis par le ministère de la solidarité nationale et de la famille. Le chiffre officiel de 1,5 million de familles nécessiteuses (soit 10 millions de nécessiteux pour une moyenne de 7 personnes par famille) pour une population de 35 millions d'habitants, est inquiétant. Les files d'attente devant les mairies pour le couffin, les restos de la rahma et le Croissant-Rouge algérien ont surpris tout le monde par leur ampleur. En effet, 5 millions de pauvres étaient attendus dans les 700 restos de la rahma autorisés durant le mois sacré de cette année. Un signe qui ne trompe pas. Les différentes aides de l'Etat, des associations caritatives et des généreux donateurs n'arrivent plus à offrir une vie décente à cette frange de la société. Avec 28 % de la population sous le seuil de la pauvreté, soit 1 Algérien sur 3, la situation devient explosive. Oran, deuxième ville du pays de par son importance économique, n'échappe pas à la tendance. Plus de 80 000 familles (30 % du nombre d'habitants estimé, soit 1,5 million) ont reçu le couffin de Ramadhan alors que plusieurs milliers d'entre eux vivent dans les bidonvilles dans des conditions insoutenables. Sans eau potable, ni réseau d'assainissement, d'où les 38 000 fosses septiques recensées ; ils survivent grâce à l'informel et à la charité. La solution ? Pour les plus avisés, “l'amélioration du pouvoir d'achat doit passer par la création d'emplois et l'amélioration de la productivité”, affirme une économiste avant d'ajouter : “On ne peut chasser la pauvreté avec 7 000 ou même 12 000 DA par mois.” Après un mois difficile, les démunis affronteront la rentrée scolaire qui s'annonce difficile et délicate. “Ce n'est pas les 3 000 DA d'aide qui vont régler le problème”, proteste un père de famille. La crise économique a dopé le nombre des démunis, même dans les pays les plus riches et industrialisés. En France, par exemple, 8 millions de citoyens vivent sous le seuil de la pauvreté, avec moins de 954 euros par mois comme ressource financière, parmi eux une bonne partie de nos compatriotes. Du coup, 13,5 % de la population sont concernés, soit 1 Français sur 7 selon les chiffres de 2009. Comment sortir de cet engrenage en Algérie ? “Sans une relance économique efficace, l'éradication de l'informel, la restructuration des banques publiques, l'encouragement à l'investissement (dans l'agriculture surtout pour réduire la facture alimentaire), la réduction du chômage, la facilitation du droit au logement, la pauvreté sera là et s'amplifiera avec de nouvelles recrues”, martèle notre interlocutrice. Quant aux chiffres de 10 % de chômeurs et du million de postes d'emplois créés en six mois, notre économiste ne semble pas convaincu tant que les chiffres de l'informel et ceux des postes d'emplois précaires de l'insertion (Daip, Cfi, Cid, Pid, Tup à Himo) ne sont pas décortiqués. D'autre part, “la caisse de retraite, la santé publique, la caisse des assurances sociales connaîtront des difficultés financières si l'informel et le chômage persistent”, conclut la jeune économiste. D'ailleurs, il ne faut pas perdre de vue la situation critique des handicapés, des SDF, des personnes âgées abandonnées et des malades mentaux. Un dossier lourd à gérer.