Ramadan est de retour et les travailleurs licenciés abusivement et non réintégrés sont toujours là, à attendre que les décisions de justice soient appliquées. La dernière instruction du chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, datée du 11 septembre, est venue mettre fin à une situation de non droit qui dure depuis 1996 sans que personne, y compris la puissante Centrale syndicale, saisisse au moins le Conseil d'Etat. Les décisions de justice — ce pouvoir censé être au-dessus de tous les autres —, relatives aux affaires sociales “El Oumali” sont exécutées parcimonieusement, selon la bonne humeur des gestionnaires. À constantine, le plus ancien employé licencié abusivement et non réintégré est une femme qui émargeait dans un média lourd. Ses déboires remontent à 1993. Tous les secteurs économiques sont concernés par ce phénomène : les forêts, les chemins de fer, le médicament, l'information, le tourisme… Depuis l'annonce de la nouvelle mesure d'Ouyahia, ces pères et mères de familles attendent. Ils attendent des précisions sur la procédure à suivre pour l'application de la décision par laquelle leur dignité peut être recouvrée. Mohamed, employé dans le secteur des services, est pessimiste. “Ouyahia a instrui les SGP pour application. Pensez-vous que ces SGP ont une liste exhaustive des cas de licenciement abusifs, enregistrés dans les entreprises ?” Son épouse, qui l'a accompagné jusqu'à notre bureau, lui suggère la piste de l'UGTA. Mohamed répond sèchement : “Pourquoi ? Y a-t-il des cadres syndicalistes licenciés arbitrairement et non réintégrés, pour qu'ils se penchent sur notre cas ?” Cette mesure exceptionnelle a été utilisée hors de son contexte et l'indemnisation des travailleurs licenciés abusivement sans leur réintégration est devenue une règle à laquelle recourent certains employeurs, par incompétence pour certains, mais surtout par mépris pour d'autres. Ainsi, pour congédier un employé encombrant, le protocole est tout simple : on recoure à un licenciement abusif. Le travailleur obtint devant les tribunaux gain de cause. On l'indemnise tout en s'opposant à sa réintégration. La procédure est légale, et elle prend au maximum douze mois. Finalement, on obtient le départ forcé du travailleur sans raison valable contre une indemnisation payée par le contribuable, étant donné que le capital des EPE est détenu exclusivement par l'Etat actionnaire. En attendant que la dernière instruction d'Ouyahia trouve son application sur le terrain, la doyenne des licenciés abusivement de Constantine, Mohamed, Nacer et les autres passeront un autre ramadan en qualité de “mzaâkin men El-Khadma”. M. K.