Liberté a rencontré Maître Ali Brahimi, député de Bouira, l'homme qui a tenté de lever une commission d'enquête parlementaire à ce sujet, et dont les responsable de la chambre basse ont refusé l'initiative, malgré la réunion du quorum réglementaire de plus de 25 députés de plusieurs sensibilités politiques. liberté : Où en est la commission d'enquête parlementaire sur la corruption ? me ali Brahimi : Notre initiative parlementaire date de juin 2009. Elle avait été refusée par le bureau de l'APN sous le fallacieux prétexte selon lequel le dossier serait trop général et étendu pour que l'enquête soit efficace. En soi, ce prétexte est un aveu révélateur de l'étendue du fléau. Celle-ci est ainsi reconnue par l'instance qui a constitutionnellement pour mission de contrôler les finances publiques. Cette posture sonne comme une neutralisation délibérée du Parlement. Le refus du bureau de l'APN est définitif. Il faut rappeler que les partis d'opposition représentés dans le bureau de l'APN y ont souscrit en connaissance de cause. La loi ne nous interdit pas toutefois de présenter une nouvelle initiative dans le même sens, mais à quoi bon devant une Assemblée dont la configuration politique n'a pas changé. Je suis également initiateur, au printemps dernier, d'une demande de commission d'enquête parlementaire sur l'état des droits et libertés laquelle est mise sous scellés par la présidence de l'APN sans motivation avancée. Le boom pétrolier actuel est une chance qui ne reviendra pas de sitôt. L'absence d'une stratégie efficiente pour édifier une économie de substitution au pétrole et le refus de juguler sérieusement l'hémorragie de la corruption risquent de priver le peuple algérien du bénéfice de cette deuxième chance. C'est dire que la responsabilité du pouvoir est grave. Quelle est l'atmosphère générale, l'ambiance au niveau des parlementaires, à propos de la corruption ? En ce moment, l'ambiance chez la plupart des députés est dominée par les calculs individuels pour un autre mandat. Ceci étant, en privé, la plupart des députés reconnaissent que la corruption a atteint des sommets inégalés ces dernières années. Mais très peu, vraiment trop peu, sont prêts à en faire un combat politique quotidien. Sous la houlette de l'organisation internationale des parlementaires contre la corruption (APNAC), l'APN a mis en place une cellule de députés contre la corruption sur l'initiative des partis de la majorité. La structure est présidée par Mme Illimi, députée d'Alger. J'en suis membre volontaire. L'objectif est de suivre et d'évaluer à l'aune du droit international y afférent le dispositif national de lutte contre la corruption. Innovation, nous avons décidé de décliner cette initiative sur les wilayas pour créer dans chacune un réseau anticorruption d'anciens et actuels députés. C'est une piste de travail intéressante si elle arrivait à sensibiliser l'opinion institutionnelle et citoyenne locale à la lutte contre la corruption. A condition aussi que l'on veille à ce que la composante des parlementaires impliqués dans ce réseau aligne des pedigrees irréprochables. Où en est-on à propos de l'observatoire sur la corruption ? Honnêtement, le pays a besoin de voir appliquer sans complaisance les lois anticorruption qu'il s'est donné au lieu d'observation. Cela est loin d'être le cas si l'on s'en tient à l'impunité insultante dont jouissent des personnes quotidiennement nommées dans la curée qui saigne les richesses nationales. Par contre, la législation sur la déclaration de patrimoine des hommes publics a besoin d'être clarifiée et rendue efficiente.