vivant en marge des bienfaits du développement, les habitants de Mouya lancent un SOS et scrutent l'horizon, dans l'espoir d'y déceler les signes annonciateurs de lendemains meilleurs. Mouya, pour de nombreux habitants de la commune et daïra de Bouzeguène, est un village quasi méconnu. Pour les responsables de la commune et de la daïra, il ne figure même pas dans leur agenda. Un hameau qui n'a pas de poids électoral. C'est du moins l'impression que semble nous expliquer en filigrane son désespoir, Dda L'Bachir, le seul vieux qui continue, vaille que vaille à vivre ou à faire semblant de vivre dans ce petit village vieux de cinq siècles. Lequel hameau se trouve , d'année en année, abandonné par ses enfants qui partent vivre sous d'autres cieux. Dès que les enfants atteignent l'âge de la scolarité, leurs parents quittent les lieux pour leur assurer une place dans une école. C'est le seul village au monde où les parents suivent leurs enfants et non l'inverse. D'autant que l'école primaire la plus proche du village se trouve à plus de 15 km. Il faut savoir que nous avons rallié ce vieux hameau en camion grâce à l'amabilité d'un jeune originaire de ce village mais qui réside, actuellement, à Loudha Guighil. “Depuis l'indépendance, aucun maire de Bouzeguène ni chef de daïra n'a mis les pieds ici pour voir comment on vit. Il faudrait plutôt parler de marginalisation, c'est-à-dire d'un long processus qui a contribué à isoler notre village du reste du monde et du minimum de développement. C'est de la hogra, n'est-ce pas”, a déclaré, dépité, Dda L'Bachir, un octogénaire qui ne croit plus, un court instant, en les responsables de la localité. “En 2008, le maire indépendant de Bouzeguène est venu nous voir, il nous a promis le sablage de notre route mais il ne l'a pas fait parce que son mandat est vite achevé. Depuis, c'est le silence total. À chaque fois qu'on rencontre les élus, ils nous disent, faites-nous une demande, après on verra !” Le vieux villageois ne se rappelle même pas du nombre de combien de lettres envoyées aux différents maires qui se sont succédé. Vivant en marge des bienfaits du développement, les habitants de Mouya lancent un SOS et scrutent l'horizon, dans l'espoir d'y déceler les signes annonciateurs de lendemains meilleurs. En attendant, ils continuent à broyer leur pain noir et à garder espoir. Situé à 5 km, seulement, du chef-lieu de la commune et de la daïra de Bouzeguène, Mouya, contrairement au reste des villages de la commune, est une cité d'un autre âge qui ressemble étrangement à ces villes fantômes du Far West vidées de leurs habitants. Près de 50 ans, après l'indépendance, Mouya n'a pas de route, pas d'eau, pas d'électricité, pas d'école… “A la tombée de la nuit, on met en marche le groupe électrogène pour avoir de la lumière pendant quelques heures puis, pour économiser l'essence, on l'arrête pour dormir. En été, c'est l'enfer. Nous ne pouvons pas conserver nos aliments sans réfrigérateur. On consomme tout ou on jette tout, c'est la règle !” dénonce encore Dda L'Bachir. Le village n'est pas doté en eau potable. Les habitants puisent l'eau d'une source qui date depuis plusieurs siècles. Les habitants consomment cette eau qui sort miraculeusement de la montagne mais en raison de son taux élevé en fer, ils ne peuvent pas l'utiliser pour préparer les aliments. Ils vont chercher l'eau à plusieurs kilomètres de là. La conduite de gaz de ville traverse leurs propriétés mais ils ne bénéficient pas de cette précieuse énergie. Durant la guerre d'indépendance, Mouya, de par sa position stratégique, a été le premier refuge des moudjahiddine. Combien parmi eux se sont réunis dans ce lieu historique. Des centaines de moudjahiddine de la région sont passés par ce village considéré comme le plus sûr pour les réunions et opérer les liaisons. Amirouche, Si Mohand Oulhadj, Si Hmimi, Hadj Tayeb, Hamadi Mohand Saïd, Ouramldane At Ferhat, Si Mohand Sadek, Les frères Akli Mohand Saïd et Makhlouf, Idir At Takouchht,…et des centaines d'autres. Mouya gardera en revanche une autre réputation, celle d'abriter le mausolée du saint Sidi M'hand Saâdi. Les vieilles femmes de la région ramenaient leurs enfants malades pour les faire passer à travers une lucarne du mausolée, symbole de guérison contre les maladies de type psychosomatique. C. NATH OUKACI akavachiw 08-11-2011 17:47 bili 08-11-2011 11:20