Estimant que la politique des militaires, chargés de gérer la transition, est similaire à celle de Hosni Moubarak, les manifestants réclament le départ du général Tantaoui, le président du Conseil suprême des forces armées égyptiennes. La contestation populaire est de retour en Egypte où des manifestations hostiles au pouvoir militaire, qui gère la transition depuis le départ de Hosni Moubarak, se poursuivaient hier au Caire ainsi que dans d'autres villes du pays à quelques jours des premières élections législatives. Des heurts opposaient des manifestants aux forces antiémeutes, au lendemain d'événements sanglants qui avaient fait deux morts et un millier de blessés à la célèbre place Tahrir de la capitale égyptienne. Hier, dès les premières heures du matin, des centaines de manifestants occupaient la place Tahrir au Caire, pendant que des heurts sporadiques opposaient la police à des manifestants aux abords du ministère de l'Intérieur, situé à proximité de l'emblématique place. La police antiémeute tirait régulièrement des gaz lacrymogènes. Dans des hôpitaux improvisés dans les mosquées, quelques manifestants étaient soignés pour des intoxications au gaz lacrymogène et d'autres après avoir été touchés par des balles en caoutchouc ou des plombs de chasse. Les contestataires scandaient des slogans demandant le transfert du pouvoir aux civils, tout en réclamant le départ du maréchal Hussein Tantaoui qui dirige le Conseil suprême des forces armées (CSFA), en criant : “À bas Tantaoui”. Des rassemblements ont eu lieu dans d'autres villes, notamment à Assouan, Alexandrie et Suez, sur la mer Rouge, où dix personnes, dont sept manifestants, ont été blessées. Ces troubles ont relancé les craintes que les législatives, qui doivent débuter le 28 novembre et s'étaler sur plusieurs mois, ne soient marquées par des incidents et des violences. Malgré cela, un membre du Conseil militaire, le général Mohsen al-Fangari, a assuré que les élections se tiendraient comme prévu et que les autorités étaient en mesure d'assurer la sécurité. “Nous n'allons pas céder aux appels pour reporter le scrutin. Les forces armées et le ministère de l'Intérieur sont capables d'assurer la sécurité des bureaux de vote”, a-t-il déclaré sur la chaîne satellitaire égyptienne Al-Hayat. Plusieurs personnalités politiques et intellectuelles, parmi lesquelles l'ancien chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Mohamed al-Baradeï, ont publié un document demandant un délai supplémentaire pour ces élections dans le cadre d'une révision du calendrier politique du pays. Ils proposent d'avoir d'abord une Assemblée constituante, puis la présidentielle et enfin des législatives. Pour calmer les esprits, le gouvernement a appelé à la “raison”, soulignant la gravité des évènements que connaît le pays. “Ce qui se passe est dangereux et a un impact direct sur la marche du pays et la révolution”, a affirmé le gouvernement dans un communiqué publié dans la nuit de samedi à dimanche. “Manifester pacifiquement est un droit constitutionnel inaliénable”, mais “le fait que les événements se sont déroulés de cette manière (...) nécessite de la part de tous de se montrer raisonnables et responsables”, a-t-il ajouté. Il a également annoncé, dans le texte rendu public, qu'il examinait actuellement “les circonstances dans lesquelles se sont déroulés les événements”, qui “seront exposées dans la transparence et la clarté au peuple dans les jours à venir.” Merzak Tigrine