AVERTISSEMENT : L'histoire qui suit n'est pas une fiction. Elle est inspirée de faits réels qui se sont déroulés au début des années 1990. Les prénoms et les professions des personnes directement touchées ont été modifiés, pour ne pas rouvrir de vieilles blessures et leur rappeler de mauvais souvenirs. Depuis quelques mois, Nadia est souvent contrainte à tout faire, seule. Sa fille Aziza ne lui facilite pas les choses. Enfant unique, elle a été gâtée. Nadia s'en rend compte maintenant que son mari travaille loin d'elle. Cela fait une année que Omar a quitté l'enseignement pour travailler dans une agence de communication, avec un de ses amis installés à Constantine. Las d'enseigner l'anglais, il n'a pas hésité une seconde pour accepter. Il n'a pas pris le temps de réfléchir. Nadia sait après tout ce temps qu'il aurait quitté l'enseignement pour n'importe quel travail. Ce qu'il fait dans l'agence le passionne. Agent de communication, il est souvent chargé de mission à travers le pays. Une fois par mois, il s'absente de la maison, pour son travail. Certaines missions durent deux à trois jours, mais il y a celles qui le retiennent une semaine ou plus loin d'Alger. Nadia assiste sa fille dans ses devoirs. Elle est en train de corriger son exercice quand le téléphone sonne. Elle ne décroche pas, ayant branché le répondeur. Elle a reçu quelques appels anonymes qui mettent ses nerfs à bout. Elle a acheté ce répondeur pour ne plus avoir à répondre à ce mauvais farceur. Il lui donne des sueurs froides en parlant d'elle, de son mari, de son passé… - Allô ? Chérie, c'est moi ! Décroche ! la prie Omar. Nadia se lève d'un bond et va répondre à son mari. Elle est heureuse de l'entendre. Il est à Constantine depuis une semaine. Nadia trouve qu'il y est depuis une éternité. Elle souffre de son absence. Elle la supporte difficilement. Le sent-il seulement ? - Je ne pourrais pas rentrer demain, lui apprend-il. J'ai encore des rendez-vous ! - Ah, lâche Nadia, très déçue. Dommage, j'avais prévu des choses pour demain. Tu penses rentrer quand ? - Si j'arrive à voir les clients demain, je pourrai être à Alger dans deux jours. Tu sais que vous me manquez ? - A nous aussi, murmure-t-elle. Tu ne peux pas imaginer à quel point ! Aziza demande sans cesse après toi. Elle est encore trop jeune pour comprendre. Ce métier que tu as choisi ne fait pas le bonheur de ta famille ! - Ne me reproche pas encore mon choix, l'avertit-il. Tu sais que je n'en pouvais plus d'enseigner. Je suis fâché avec le tableau, la craie, les élèves ! - Mais on était bien avant, insiste-t-elle. Tu étais avec nous ! - Je sais, mais j'adore mon nouveau job, se défend Omar. Je suis désolé mais ni tes reproches ni tes larmes ne pourront me pousser à changer de profession… Il faut t'y faire ! Nadia remarque que leur discussion a pris une tournure des plus sérieuses. Elle révèle dans le fond que leur bonheur n'est pas parfait. Il suffirait que la discussion soit un peu plus poussée pour qu'un abîme se crée entre eux. Nadia le sent tout près. Elle ne voudrait pas que son mariage échoue. - Quand tu seras las de trimbaler ta valise d'une ville à une autre et que tu voudras de la stabilité, tu sais où nous trouver…, lui dit-elle en mettant un peu de joie dans sa voix. En attendant, sache qu'on t'aime ! - écoute, inutile de t'inquiéter, répond-il. Je rentrerai tôt ou tard… Prend bien soin de toi et de la petite ! Nadia le lui promet. Quand elle raccroche, elle pense à la déception de sa fille quand elle saura que son père ne rentrera pas tout de suite. Les parents d'élèves sont convoqués pour une réunion et il ne sera pas de ceux-là. Aziza, qui adore son père, aurait voulu le présenter à sa maîtresse et à ses camarades. Omar est un bel homme en plus d'être charmeur. Grand brun aux yeux verts, il ne passe pas inaperçu. Aziza a hérité de lui ses yeux et son sourire. Elle tient le teint blond de sa mère et sa petite taille. C'est un amour de petite fille. Omar ne résiste pas longtemps quand elle fait un caprice. Nadia se demande si elle ne pourrait pas se servir de sa fille pour le ramener à la maison. (À suivre) A. K.