La troisième rencontre des ministres des Affaires étrangères des pays du champ a été bouclée, mardi soir, en une journée ; les ministres s'étant rapidement accordés sur les dossiers à son ordre du jour. Outre l'évaluation du parcours depuis la rencontre d'Alger en mars 2010 suivie de celle de Bamako (Mali) en mai 2011, il a été question de l'analyse de la situation dans la sous-région à la lumière des développements qui ont marqué cette période, particulièrement au plan sécuritaire. Il a été décidé à l'issue du conclave des quatre auquel était invité le Nigeria, déjà membre de l'Unité de fusion et de liaison, en tant qu'observateur, la création d'autres mécanismes, à l'image de l'UFL et du Cemoc, pour compléter le dispositif et accompagner l'action commune des pays du champ. Ainsi, les ministres ont décidé de la création d'un comité politique dont la tête n'a pas été déterminée. Il sera piloté, soit par les chefs d'Etat, soit par les MAE ou les chefs de gouvernement. Comme il a été décidé la mise en place d'un comité technique de suivi des projets de développement. Des projets que le ministre délégué chargé des Affaires africaines et maghrébines, Abdelkader Messahel, a détaillés. Il s'agit des projets d'infrastructures, citant la Transsaharienne qui reliera Alger à Lagos et dont il ne reste que 200 km à achever au Niger, de la finalisation de la route Tindouf Choum, de la route entre l'Algérie et le Mali pour désenclaver le nord du Mali, ainsi que d'une route transversale qui ira de la frontière libyenne jusqu'à la Mauritanie. Ayant, par ailleurs, enregistré avec satisfaction les résultats des activités de l'UFL, le sommet a répondu positivement aux requêtes de l'Unité, notamment concernant son budget pour soutenir son plan d'action. À l'exception du Nigeria, les quatre pays devront désormais apporter leur contribution à parts égales à ce budget, supporté depuis le début par l'Algérie. La question des derniers évènements survenus au nord du Mali, qui a entouré les travaux, a été rapidement tranchée par les ministres qui ont estimé qu'il s'agit d'une affaire interne à ce pays. Le ministre malien des Affaires étrangères, M. Maiga, est revenu sur les circonstances de cet épisode en précisant qu'il s'agit de groupes revenus de Libye qui ont vu en la relève qu'effectue l'armée chaque semestre et le renforcement de la présence militaire pour sécuriser la région ainsi que les prochaines élections une menace contre eux. Déplorant cette violence, il a déclaré que le gouvernement était prêt à discuter et qu'il était disposé à répondre à toutes leurs revendications, excluant évidemment celles qui pourraient porter atteinte à l'unité du pays. “Le gouvernement est disposé à prendre en charge toutes les revendications”, dit-il, invitant les rebelles au dialogue politique qui est la voie idoine au règlement de tout. De son côté, le ministre algérien a rejeté la violence, mais il a considéré que la question était interne au Mali, qu'elle est identitaire et ne peut en aucun cas être assimilée au terrorisme, comme l'a insinué dans son intervention à l'ouverture des travaux le ministre malien. Les ministres ont vite recentré le débat autour de la principale problématique qui est le terrorisme. “Notre sujet est la lutte contre le terrorisme”, a déclaré, de son côté, le MAE mauritanien, Hamadi Ould Hamadi, qui a mis l'accent sur le ciblage des groupes terroristes, à l'instar de Boko Haram au Nigeria qui a réussi à jeter des passerelles avec Aqmi. Confirmation du ministre nigérien, Mohamed Bazoum, réputé pour son franc-parler, qui révélera l'existence de cette connexion entre les deux groupes, notamment en matière de “formation”. Des éléments de Boko Haram ont subi des entraînements dans les camps d'Aqmi alors que d'autres ont été entraînés par les Shebab somaliens. “Nous avons des informations sûres sur ces liens”, a-t-il dit. D'où la présence du Nigeria, en tant qu'observateur, “à notre demande”, a souligné M. Hamadi. La cible est également les réseaux de soutien logistique aux groupes terroristes. Les ministres ont exhorté l'UFL, surtout, et le Cemoc à fournir plus d'efforts pour “couper les réseaux qui fournissent carburant et nourriture aux éléments d'Aqmi”, mais également, comme l'a précisé M. Bazoum, travailler “contre le paiement des rançons”. Les pays du champ sont unanimes sur cette question qui est la principale source de financement du terrorisme dans le Sahel. Mais des pays (occidentaux) hésitent encore à adhérer à la proposition de résolution pour la criminalisation du paiement des rançons soumise par l'Algérie à l'ONU. “Nous continuerons la campagne pour les sensibiliser sur cette question”, a indiqué M. Messahel. “Une rançon payée pour libérer un otage servira à tuer des centaines d'autres personnes”, a précisé M. Hamadi. Cette rencontre est également un prélude au Sommet Alger II qui se tiendra ce trimestre à Niamey et auquel sont invités, en plus des partenaires extrarégionaux qui ont participé au Sommet d'Alger au mois de septembre 2011, l'Egypte, la Tunisie, le Tchad et le Burkina Faso. Pour les pays du champ, “le format à quatre”, il s'agit de présenter des projets auxquels les partenaires extrarégionaux, qui ont favorablement accueilli “leur vision commune” à Washington et à Bruxelles, peuvent apporter le soutien et la contribution. Après “l'appropriation de ce combat contre le terrorisme au Sahel”, principe cher à M. Messahel, le MAE mauritanien insiste sur les capacités des quatre à relever le défi. Les partenaires sont invités à s'impliquer dans les projets socioéconomiques et l'investissement. Ils ont salué le travail effectué par l'UFL dont ils ont appuyé la stratégie et la feuille de route avec le vœu que les autres mécanismes, notamment le Cemoc, fassent de même. N'ont-ils d'ailleurs pas omis de saluer “le satisfaisant et pertinent travail du Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme (Caert relevant de l'Union africaine)” dont un membre a présenté un rapport fortement apprécié par les experts et les ministres. D. B.