Quand on voit le foisonnement extraordinaire des fast-foods, le spectacle désolant des jeunes filles grassouillettes se goinfrant de pizzas géantes et de sodas et des jeunes hommes dévorant goulument des sandwichs m'chaourma accompagnés de pommes frites, dégoulinant de mayonnaise, de ketchup et de harissa, on ne peut que s'interroger sur le mode de consommation alimentaire des Algériens et le coût que ces habitudes impliquent pour la collectivité nationale, notamment en termes de santé publique. Ces signes apparents, en plus du phénomène d'obésité qui touche de plus en plus nos adolescents, ainsi que les pathologies chroniques telles que le diabète et les maladies cardiovasculaires, qui, désormais, atteignent selon les estimations des spécialistes, plus de 10% de la population algérienne, cachent, en vérité, une tout autre réalité. Selon les statistiques de la FAO (2009), la consommation alimentaire des ménages algériens, se situerait loin derrière celle du Maroc, de la Tunisie et de l'Egypte. En effet, il semble, selon cette institution, que la consommation par tête d'habitant dans les catégories viandes rouges, blanches et poissons serait de l'ordre de 29,67kg/an/habitant en Algérie, 39,45 au Maroc, 45,20 en Tunisie et 42,57 en Egypte. En termes de calories, l'Algérie occuperait la 44e place sur 184 pays avec 3095 calories/ personne/jour. Mais là n'est pas la question. Puisque globalement, nous nous positionnons relativement honorablement dans le domaine alimentaire et nutritif au sein des nations émergentes. En fait, il s'agit de la “mal bouffe” des Algériens, de l'impact de leur mode de consommation sur leur santé ainsi que les conséquences économiques et financières que la société devra supporter. Au demeurant, les indicateurs épidémiologiques révèlent une hausse des maladies non transmissibles (hypertension artérielle, maladies cardiovasculaires, diabète…). Ce type de pathologies serait dû aux progrès économique et social réalisés par la société algérienne, qui tend à être confrontée aux mêmes problèmes de santé que les pays développés mais elles sont dues également, pour de nombreux nutritionnistes, à la mal bouffe (excès de sucre, de sel, de gras…). Selon l'ancien ministre des Finances, Abdellatif Benhachenou, en 2005, sur les 5 milliards de dollars qui étaient alloués au secteur de la santé, 65% étaient destinés aux ressources humaines, 20% pour les médicaments et 15% pour les équipements ce qui représentait 8% du PIB. Pour Ould Abbès, ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, les dépenses de l'Etat destinées aux médicaments importés “sont passées de 1,045 milliard de dollars en 2010 à 1,700 milliard de dollars en 2011. Par ailleurs, le Centre des statistiques des douanes, affirme que la facture des médicaments à usage humain demeure la plus importante avec 1,63 milliard de dollars au cours des 11 premiers mois de l'année 2011 contre 1, 045 milliard de dollars pour la même période de 2010. Le Conseil économique et social(CNES), dans sa 13e session plénière tenue le 11 et le 12 novembre 2011, en traitant des maladies cardiovasculaires, sur la base de l'enquête nationale de santé(INSP) avait déjà montré que l'hyper- tension artérielle (HTA) occupait la première place parmi les maladies chroniques. Selon la même institution, toutes les études réalisées antérieurement ont confirmé la tendance de la progression des maladies cardiovasculaires qui touchent 15 à18% des adultes de plus de 18 ans. En vérité, si nous sommes dans une pareille situation, c'est que le quotidien des Algériens se complique économiquement et financièrement. À la limite, ces derniers préfèrent dépenser 100 dinars/jour dans un sandwich, qui nuit à leur santé, plutôt que de s'offrir un repas hors de leur bourse. La mal bouffe, est corrélée, nécessairement, à leur pouvoir d'achat. A. H.