Les animateurs de la fondation estiment que la classe politique ne s'intéresse pas assez, voire pas du tout, au phénomène de la drogue en Algérie, qui touche environ 5 millions de personnes, si l'on compte l'entourage proche des consommateurs, réguliers ou occasionnels, de substances hallucinogènes La Forem (Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche) a lancé, hier, un appel, en direction des candidats aux élections législatives, les incitant à intégrer la lutte contre la drogue dans leurs programmes électoraux et d'exprimer clairement leur position à l'égard de ce fléau. “Nous les invitons à adhérer à un code d'honneur national par lequel ils s'engagent à œuvrer, sans relâche, à promouvoir la société civile et à consolider ses fondements”, explique le Pr Mostefa Khiati, président de la Forem. “Cet appel s'inscrit dans la suite d'une série d'actions de sensibilisation contre la consommation de drogue et sera suivi par d'autres”, poursuit notre interlocuteur. Le 3 janvier dernier, la Forem a mis en branle une campagne nationale de lutte contre la toxicomanie qui s'étalera sur toute l'année 2012. Environ 20 000 posters ont été affichés et 60 panneaux géants placés dans les quartiers des villes du pays. Un livre blanc sera bientôt édité. Il tracera la situation de la toxicomanie en Algérie et les difficultés rencontrées par les animateurs du mouvement associatif, dans la prise en charge du phénomène, qui prend de plus en plus d'ampleur. À se référer aux chiffres officiels livrés par l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie, il est recensé, dans notre pays, 300 000 consommateurs réguliers de substances hallucinogènes. La Forem estime, pour sa part, qu'il existe approximativement un million de drogués, si l'on inclut les consommateurs occasionnels, c'est-à-dire ceux qui fument des joints ou absorbent des psychotropes une à deux fois par semaine. “Jusqu'à présent, la classe politique ne prend pas en considération les enjeux sociaux. Pourtant, environ 5 millions de personnes sont concernées par la drogue, si l'on compte l'entourage des toxicomanes. Cela constitue un gisement électoral important”, souligne le président de la Forem. Pour cette raison, la fondation souhaite amener les candidats à la députation à inclure ce chapitre dans le débat électoral. “L'objectif est de créer un nouveau discours qui touchera les jeunes”, précise le Dr Fawzi Oussedik, universitaire et membre actif de la Forem. L'idée est de faire parler de la drogue, mais aussi de sensibiliser les futurs élus à l'Assemblée nationale sur la nécessité de réviser les lois codifiant la lutte contre la toxicomanie. “La législation algérienne est trop laxiste sur le trafic et la vente de drogue”, soutiennent le Pr Khiati et le Dr Oussedik. Pourtant, elle condamne les consommateurs de cannabis, héroïne et autres à des peines privatives de liberté. “Nous voulons justement que les peines d'emprisonnement soient remplacées par des travaux d'intérêt général. Il faut considérer le toxicomane comme une victime et non un criminel”, affirment-ils. Ils estiment, par ailleurs, que la prise en charge de cette catégorie de citoyens est inappropriée, dans la mesure où elle s'articule essentiellement sur la médicalisation. “Dans la majorité des cas, les Algériens consomment du cannabis. Nous n'avons alors pas besoin de médicaments ou de lits d'hospitalisation, mais d'un suivi sur le plan psychologique”, commente le Pr Khiati. De son point de vue, les autorités nationales ne focalisent pas assez sur le volet sensibilisation, d'autant qu'il est avéré que les accros aux drogues sont âgés, majoritairement, entre 13 et 35 ans. Il est connu aussi que les établissements scolaires, notamment les collèges et les lycées, sont devenus des lieux de grande prise de substances illicites. Par le truchement de l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie, l'Algérie met en œuvre un plan de lutte contre la drogue, auquel contribuent quatorze ministères en sus de la Police et de la Gendarmerie nationales. S H.