La moudjahida a tout sacrifié en s'engageant pour la cause juste de son pays, à savoir sa libération. Lors d'une rencontre avec les étudiants, elle fera le récit de son parcours, qui est à la fois exemplaire et douloureux. À la question d'une étudiante de l'Institut de l'histoire de l'université de Batna relative à un sentiment de regret de la part de la moudjahida, Annie Fiorio-Steiner, suite à son engagement pour la cause algérienne, répondra avec conviction : “Non ! Non ! Non ! Au contraire, si c'est à refaire, je m'y mettrais avec joie”. Et peu avant, au cours de sa conférence, d'expliquer que le secret qui lui a permis de résister et de poursuivre son militantisme contre l'occupant est l'élan de solidarité du peuple algérien. “Si j'ai pu tenir d'une manière forte, c'est à cause de la solidarité immense qui nous a soudés”, a-t-elle confié. Annie Fiorio-Steiner a donné, avant-hier à l'université de Batna, une conférence suivie d'un débat à l'occasion du 50e anniversaire de l'Indépendance, laquelle a été suivie par plus d'un millier d'étudiantes et d'étudiants, qui sont restés accrochés à ses lèvres pendant plus de deux heures. Accueillie en véritable héroïne, cette femme, qui a milité pour l'Algérie, reste fidèle et déterminée à transmettre aux jeunes d'aujourd'hui le message de leurs aînés en leur racontant les sacrifices consentis. Annie Fiorio-Steiner, qui a réalisé un livre d'entretien avec notre collègue Hafida Ameyar (Annie Fiorio-Steiner. Une vie pour l'Algérie, éditions de l'association les Amis de Abdelhamid Benzine), a raconté les origines de son engagement, son combat anticolonialiste, son arrestation en 1956, sa condamnation à cinq années de prison pour fabrication d'explosifs et atteinte à l'ordre public. Elle n'a cessé de répéter qu'elle savait que l'Algérie allait gagner. Elle a également rendu hommage à Ahmed Zabana et à Fernand Yveton, ainsi que les 58 moudjahidine exécutés à la prison de Serkadji. Le témoignage émouvant d'Annie a eu écho auprès des étudiants : youyous, larmes d'émotions, applaudissements nourris, notamment lorsqu'elle a prononcé les dernières phrases des guillotinés : “Allah akbar” et “Achate El-Djazaïr horra (vive l'Algérie libre). Elle a, par ailleurs, raconté les scènes de vie vécues dans les six prisons où elle a été incarcérée, à l'image de la prison de Blida, de Barberousse (actuellement Serkadji) et d'El-Harrach. Annie a aussi évoqué la grève de la faim qu'elle avait entamée. Les souvenirs tristes abondent : la torture, les interrogatoires, les violences et les injustices du colonisateur. Elle s'est aussi longuement attardée sur les tortures qu'elle avait subies à la prison d'El-Harrach jusqu'à sa libération. Concernant ce jour où elle a retrouvé sa liberté, elle dira : “Ce jour, j'ai regardé mes mains, je les ai trouvées toutes blanches et les ongles bleus. Je me suis dit, c'est bien, je suis encore en vie.” Elle a enfin affirmé que son combat était pour une cause juste : la libération de l'Algérie. Et de lancer à l'adresse des étudiants : “Je vous fais confiance pour l'avenir de notre pays l'Algérie.” B. B