Abou Djerra Soltani évite toute attaque frontale contre le pouvoir, alors que Abderrezak Mokri a accusé, sans coup férir, l'administration d'avoir “manipulé les résultats”. Les résultats des dernières législatives auraient-ils précipité le MSP dans un gouffre ? Ils ont, du moins, révélé au grand jour que le Mouvement de la société pour la paix (MSP, ex-Hamas) est miné par des dissensions internes qui risquent de l'imploser. La défaite a fait remonter à la surface les guerres de leadership, qui se font sentir de plus en plus à la faveur de la débâcle de l'Alliance verte aux législatives. Cette défaite est révélatrice d'un malaise profond. Les premières lectures faites des déclarations de différents responsables du parti de feu Nahnah expliquent que les prochains jours ne seront pas de tout repos pour un parti qui a choisi, à quelques jours seulement des élections, la voie de l'opposition, en claquant la porte de l'alliance présidentielle. Une alliance qu'il avait contractée huit années auparavant. À la lecture des résultats obtenus par l'Alliance verte, il en ressort, d'abord, un net recul de l'électorat islamiste. Ensuite, les deux formations alliées du MSP, El-Islah et Ennahda en l'occurrence, issues toutes les deux de mouvements de redressement qui les a soustraites à l'hégémonie de Djaballah, sont désormais de potentiels alliés du parti dominant à la future APN. Et cela, dans le cas où le MSP n'arriverait pas à dresser une feuille de route commune pour le triumvirat. Elles le seront d'autant plus que l'alliance n'était que conjoncturelle et électorale. Ennahda et El-Islah, en subalterne insignifiant sur l'échiquier politique national et surtout dans la mouvance islamiste, sortent grands gagnants en comparaison avec l'échec cuisant du MSP. La moitié des sièges obtenus par l'alliance leur reviennent de droit. Ce qui ne laisse au MSP que la moitié des 48 sièges obtenus. Le MSP avait 52 sièges lors de la précédente législature. Autant que faire se peut, Abou Djerra Soltani évite toute attaque frontale contre le pouvoir. L'annonce des résultats par Ould Kablia a fait réagir, plutôt, Abderrezak Mokri, qui, sans coup férir, a accusé l'administration d'avoir “manipulé les résultats”. Il a même menacé de “prendre les mesures qu'il faudra”. Les réactions de Mokri sont venues au moment où Abou Djerra Soltani s'est contenté de lire la déclaration de l'Alliance. D'aucuns estiment que la réaction de Soltani est une manière déguisée de valider les résultats annoncés par le ministère de l'Intérieur. Ceci dit, le chef du MSP prend du recul par rapport aux différentes déclarations de campagne. À cet imbroglio s'ajoute l'équation Ghoul, qui, à lui seul, a récolté une quinzaine de sièges dans la capitale. C'est une première pour le MSP. “J'appartiens, d'abord, à l'Etat.” Telle a été la déclaration d'Amar Ghoul, ministre des Travaux publics, tête de liste de l'Alliance verte à Alger et membre influent au sein du MSP, dans la soirée de jeudi, au moment où tombaient les premiers résultats. Ghoul prend-il ses distances par rapport à sa formation ? S'opposera-t-il aux mesures que prendra son parti contre ce qu'il appelle “la manipulation grossière des résultats” ? Fort des quinze sièges obtenus à Alger, presque la moitié des sièges du MSP, Amar Ghoul pourrait être reconduit dans le futur gouvernement. Avec une légitimité acquise par les urnes, des années aux services de l'Etat, Ghoul voit ainsi son avenir politique assuré, même en dehors d'un cercle partisan. Cette sentence prononcée par Ghoul balaie d'un revers de la main toute probabilité, pour lui, de rester fidèle à son parti, si celui-ci décidait de ne pas siéger dans le futur gouvernement. Lui, qui n'a pas quitté le gouvernement Ouyahia après le retrait du MSP de l'alliance présidentielle, s'adjuge des trophées électoraux qui renforceront sa position au sein de sa formation et même au sein du futur gouvernement. Ce rififi au sein du MSP profitera sans doute à la formation d'Abdelmadjid Menasra, qui aura vu juste, plus tôt que tout le monde, en considérant que la ligne imprimée au parti par Soltani menait à la déroute. En définitive, tout cela participe à l'implosion du MSP, dont le président actuel est sur la sellette, lui qui croyait qu'avec un score appréciable aux élections, ses détracteurs feront flanelle… M M