MBM, le logiciel d'Aqmi, a-t-il été tué ? Mokhtar Bel Mokhtar, affectueusement appelé le “Borgne" ou Khaled abou El-Abbès pour les intimes, serait mort, abattu à Gao. Si l'information se confirme, ce seront 10 années d'histoire entre Aqmi et le Sahel qui se trouvent effacées. Alors qu'un attentat-suicide a secoué les portes du désert, à Ouargla, c'est à Gao, dans le nord du Mali, qu'est venue l'information la plus saisissante. L'“émir" du désert, Mokhtar Belmokhtar, recherché depuis 12 ans par Interpol et tous les espions avertis, a été tué par un Targui au sortir d'une altercation. Belmokhtar, pour ceux qui adorent les précisions, est le chef de katibat El-Moulathamoune (les enturbannés) et le premier “émir" terroriste à avoir donné la profondeur stratégique d'Aqmi en partant à la conquête des zones inhospitalières du Sahel vers le Grand-Sud algérien jusqu'en Afrique de l'Ouest. Mais le “Borgne", natif de Ghardaïa, est bien plus que cela. C'est la tête pensante du déploiement d'Aqmi dans cette région, devenue à la faveur du chaos malien une zone ingérable. Alors que les spécialistes ne savent plus qui fait la guerre à qui, entre le MNLA, Ansar Eddine, le Mujao ou katibat Tarek Ben Zyad, Belmokhtar, l'organisateur attitré d'Aqmi au Sud, est éliminé de l'équation. Car Belmokhtar, c'est une vingtaine de condamnations à mort, c'est l'homme qui voulait créer un califat islamique au Sahel, qui a séjourné deux mois à Tripoli pour fédérer les qaïdistes de Libye avec les sections d'Aqmi. Belmokhtar, c'est aussi celui qui a sanctuarisé Aqmi dans le nord du Mali à coup d'alliances tribales, de mariages tactiques et redistribution de l'argent des rançons pour s'acheter la paix pour les terroristes. Belmokhtar, ce sont également des écoles coraniques qui ont fait basculer les jeunes Touaregs dans la salafia, c'est le marchand d'armes qui négocie au Burkina Faso, qui appelle les conseillers d'ATT au téléphone, qui a mis à genoux les puissances occidentales par une politique de rapt efficaces, c'est aussi le parrain de la “Marlboro Connection" ou l'interlocuteur des cartels de la cocaïne d'Amérique du Sud. C'est pour toutes ces raisons que sa mort, espérée également par ses amis Abou Zeïd, Abou Alqama ou Abdel Wadoud, à qui il faisait de l'ombre jusqu'à être considéré comme le Ben Laden du Sahara, va inévitablement pousser Aqmi vers la stratégie du pire. Après avoir tenté de mettre un pied dans le conflit nord malien, Aqmi va entrer dans la véritable guerre, contre tout le monde.