Cinq décennies après l'Indépendance, les mines antipersonnelles continuent de semer la mort parmi les civils. Ce sont souvent des enfants et des bergers qui se font prendre par la détonation fatale. C'est le modèle des crimes de la France coloniale qui, un demi-siècle après l'Indépendance, font encore des victimes. Les explosions de mines antipersonnelles ont fait 2 329 victimes, selon les statistiques du ministère des Moudjahidine, à quoi, il faut ajouter la prise en charge médicale, financière et psychologique de 3 236 blessés. Selon d'autres sources, le nombre de victimes, depuis l'Indépendance, s'établirait entre 3 000 et 4 000 morts et 80 000 blessés. Les mines antipersonnelles semés par la France notamment le long des frontières avec le Maroc et la Tunisie, sont pour reprendre l'expression d'un jeune chercheur algérien, “l'ennemi vigilant qui continue à tuer". L'Algérie continue à sensibiliser l'opinion publique internationale avec le concours des organisations et associations qui œuvrent pour obliger la France à reconnaître ses crimes, à indemniser les victimes et à demander pardon pour ses odieux crimes. Des experts algériens se sont attelé, en coordination avec des Organisations non-gouvernementales, à l'élaboration d'un dossier criminalisant la France pour ses crimes contre l'humanité en Algérie par la dissémination de près de 20 millions de mines antipersonnelles. Le processus de leur destruction, engagé par l'Algérie au lendemain du recouvrement de l'Indépendance, a atteint sa vitesse de croisière et sera complètement achevé au terme du délai supplémentaire de 5 ans qui a été accordé par l'ONU pour dépolluer l'ensemble des champs frontaliers minés. Ce délai, sollicité par l'Algérie, a été calculé minutieusement en tenant compte de tous les impondérables et compte tenu des techniques ultramodernes et hautement sécurisées actuellement utilisées pour la destruction des mines restantes, estimées à plus de deux millions et demi. Aux travaux de l'association Mechaâl Ech-Chahid (2011), en présence d'officiers chargés du déminage, il a été annoncé la remise en état de 1 135 hectares à leur vocation agricole dans les wilayas de Tébessa et El-Tarf. L'officier en chef chargé du déminage a également affirmé que 79 184 mines dont 74 895 mines antipersonnelles et 4 289 mines anti-groupes ont été complètement neutralisées dans ces régions frontalières de l'est du pays. Le taux d'extraction des mines dans la région orientale de l'Algérie est de l'ordre de 40,05%, devait-il ajouter, soulignant que c'est dans la wilaya de Tébessa qu'avait été semé le plus grand nombre de mines, sur une ligne de plus de 386 km linéaires. Sur des parcours très fréquentés par les hommes ! Les lignes Challe et Morice représentent encore l'un des plus importants dossiers hérité du colonialisme, se sont accordés à souligner, par ailleurs, des historiens et des moudjahidine lors de cette rencontre qui a vu également la participation de plusieurs victimes des mines antipersonnelles. La ligne Morice, barrage électrifié et miné, fut construite à partir de juillet 1957, le long des frontières de l'Algérie avec la Tunisie et le Maroc. Longue de 460 km à la frontière tunisienne et de 700 km avec le Maroc, cette ligne a été partiellement doublée par une autre ligne dite ligne Challe du nom du général. L'armée française a semé le long des frontières avec le Maroc et la Tunisie onze millions de mines antipersonnelles lors de la guerre d'Algérie. La Gendarmerie nationale a découvert, en 2010, 108 000 mines antipersonnelles (modèle 1957) contenant chacune plus de 100 grammes de TNT. La France n'a toujours pas remis à l'Algérie, la cartographie complète de ses mines. En 2005, le général Jean-Louis Georgelin, chef d'état major des Forces armées françaises, a officiellement remis à son homologue algérien, le général de Corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, des plans concernant la période de 56 à 59 et uniquement pour la ligne Morice ! Et ces mines ne sont pas seulement disséminées à la frontière mais partout où l'armée française en sentait la nécessité de protéger ses arrières. Ainsi, le 26 août 2007, un enfant, âgé de 14 ans, a sauté sur une bombe antipersonnelle datant de l'époque coloniale, enfouie sous terre dans la région de Béni K'sila, près du littoral, à l'ouest de Béjaïa. La victime, qui a eu une jambe amputée à la suite de cet accident, voulait cueillir des figues lorsqu'elle a marché sur l'engin explosif. D. B.